Moins drôle – L’édito de Christophe Bonnefoy
Moins drôle – L’édito de Christophe Bonnefoy
Il avait ce flegme presque britannique qui en fit l’un des acteurs les plus appréciés du cinéma français. Il fut, et restera, cette voix reconnaissable entre mille, cette moustache dont il ne se défit jamais, cet œil coquin autant que touchant, parfois. Il était attachant, tout simplement. Classe, élégant, simple.
Jean Rochefort s’est éteint dans la nuit de dimanche à lundi. Avec lui, part vers le paradis l’un des derniers géants français du Septième art. Un éléphant qui nous fit hurler de rire, à vouloir énormément tromper dans les années 70. Un classique. Une comédie comme on n’en fait presque plus. Il fut aussi de l’aventure du Grand blond. De ces vieux films qui ne prennent pas une ride au fil des décennies. Parce qu’ils sont portés par des acteurs de génie dans cette si périlleuse catégorie du “faire rire”.
Mais Jean Rochefort savait tout faire. Tout jouer. Comme Brasseur. Comme Noiret. Comme Serrault. Il savait d’un simple sourire déclencher l’hilarité. Et également, d’un unique regard, émouvoir. Il avait d’ailleurs reçu le César du meilleur acteur pour son rôle dans le Crabe-Tambour, très loin de l’incarnation habituelle du dandy espiègle.
L’acteur, c’étaient plus de 120 films. L’homme, un amour immodéré pour les chevaux, jusqu’à apporter son côté décalé aux commentaires télévisés lors des jeux Olympiques d’Athènes en 2004, pendant les épreuves d’équitation. Une vie entière dédiée à ses deux passions.
Sans rire, Jean Rochefort nous manquera. La culture est aujourd’hui orpheline, d’une certaine façon, de ce côté populaire qui refuse le vulgaire. De cet art d’atteindre sans être élitiste.