Michel Garnier, du Vatican aux vignes de la Haute-Marne, après Dharamsala
Concert exceptionnel dans l’église de Coiffy-le-Haut, jeudi de l’Ascension, où Michel Garnier s’est produit. L’auteur-compositeur mystique, qui œuvre historiquement avec Pakoune, et des choristes, jouit d’une aura internationale. Ici aussi, c’était écrit, le concert émouvrait aux larmes. Le pape François lui-même le sait.
« Pierre était venu plusieurs fois à mes concerts. Un jour, il m’a confié qu’il faisait écouter mes compositions dans ses vignes et dans sa cave ». Le vigneron Pierre Pelletier de Coiffy-le-Haut se justifie auprès de Michel Garnier. Il veut que Sois béni ou François des oiseaux résonnent chez lui car « tout liquide prend obligatoirement ce qu’il y a dans son environnement ». En clair, les chansons et les oratorios du musicien « s’unissent avec le vin ». Michel Garnier tombe d’accord. Au nom de cette convergence de perceptions, qui vient en plus de l’amitié des deux hommes, l’auteur-compositeur a donné un concert jeudi 26 mai avec Pakoune, son interprète « depuis 35 ans ». L’église était pleine comme un œuf.
« Le pape François s’est mis à fredonner »
« L’UNESCO voulait une œuvre qui incarne la déclaration des droits de l’homme. J’ai aussitôt vu défiler des tableaux… ». Michel Garnier imagine un spectacle pour le demi-siècle de l’institution (1995), avec le soutien d’Amnesty international et d’une cohorte de personnalités : l’Abbé Pierre, Mère Thérèsa, Peter Gabriel… sans compter que Robert Hossein « prêtera sa voix » lors de la Première. « J’ai même reçu un fax depuis Dharamsala : c’était le dalaï-lama, qui m’adressait son parrainage… ». Michel Garnier et Pakoune vont rencontrer le chef du bouddhisme tibétain, en 1998. « On aurait cru revoir un ami ». Vingt plus tard, c’est avec le leader spirituel des chrétiens que le duo a rendez-vous. « On a chanté devant le pape François dans la bibliothèque du Vatican, où il reçoit les chefs d’État ». Michel a fait traduire en espagnol son oratorio pour saint François d’Assise François des oiseaux pour que le Saint-Père argentin aspire tout, entre dans la prosodie. Avec ce pape-là, pas de baiser sur l’anneau, et c’est tant mieux car « c’est le clergé qu’(il) n’aime pas » : Michel se réclame au contraire de l’Église de Jean, de Marie-Madeleine. « François a fini par fredonner, il avait les larmes aux yeux ». Avant de quitter Michel Garnier et Pakoune, le Saint père… confesse son émotion. « C’était magnifique », et leur demande de « continuer à prier pour (lui) ».
« Mon public est de toutes confessions »
« Michel est habité par ses textes, on peut imaginer que Saint-François d’Assise était dans cet état d’esprit ». Le musicien relaie son hôte Pierre Pelletier, et renchérit. « Saint François d’Assise s’apparentait à un chamane, il a été le premier patron des écologistes ». Hep hep, Michel Garnier y va cette fois fort dans le grand écart entre croyances… « Les gens qui viennent à mes concerts sont de toutes les confessions ». Au passage, ils sont aussi « de tous les âges ». Avec Pakoune, Michel Garnier se produit aussi bien dans de petites églises -las- méconnues comme celle de Coiffy-le-Haut que dans la basilique de Saint-Maximin (le duo y sera le 17 juin), dans l’église des Saintes-Maries de la Mer (les 22 et 23 juillet prochains), lieux qui « parlent » à un public plus large… ou bien au Zénith de Toulouse.
« Entendeur » de musique
« Très jeune, j’entendais la musique ». Non, il ne s’agissait pas de la « comprendre », et tant pis pour ceux qui voudraient que Michel s’explique plus avant. Le marmot s’imagine alors que tout le monde « l’entend » comme lui. Il constatera que l’intuition est faillible. Aujourd’hui encore, il « entend » différemment de l’immense majorité d’entre nous. « Si, en passant devant un bistrot, j’entends de la musique, elle s’ancre dans ma tête ». Plus exactement… elle l’encombre. « Je deviens incapable de composer pendant une semaine ». Il faudra un moment pour qu’il revienne sur sa relation à part à la musique. « Je suis un autodidacte ». C’est choisir de retenir que le talent est affaire de révélation.
Fabienne Ausserre
f.ausserre@jhm.fr