Mettre le paquet – L’édito de Patrice Chabanet
A quelque chose malheur est bon. La tragédie que nous vivons a mis au jour les faiblesses de notre système de santé. Les manifestations et la mobilisation des médecins, des infirmières et des aides-soignantes avaient tiré la sonnette d’alarme. Des concessions avaient été faites plus pour calmer la grogne que pour prendre le mal à la racine. Hier, à Mulhouse, Emmanuel Macron est passé à la vitesse supérieure. Il a annoncé « un plan massif d’investissement et de revalorisation des soignants ». On pourrait dire : enfin. Même si le chef de l’Etat n’est pas le seul responsable du délabrement de notre système sanitaire, conséquence de plusieurs décennies de renoncements, c’est lui qui est en exercice. C’est lui qui est exposé à la vindicte des réseaux sociaux. Malheur à celui qui préside…
Les précédentes crises – comme celle de 2008 – ont démontré que les leçons tirées et les promesses s’évanouissaient vite dans le sable de l’actualité. Une répétition de ce qu’on disait en 1918, « la der des ders ». Mais cette fois-ci, chaque Français se sent concerné dans un domaine sacré, la santé. Les héros de ce nouveau Valmy, les soignants, montés en masse pour combattre le Coronavirus, ne resteront pas l’arme au pied, si des miettes leur sont distribuées au motif que la crise économique diminuerait les marges de manœuvre du gouvernement. Emmanuel Macron sera attendu là. Les oppositions aussi : leurs contre-propositions devront être chiffrées et leurs priorités clairement énoncées. L’heure n’est plus à la revanche de 2017, mais à un débat ouvert, vif s’il le faut, pour sortir notre pays de l’ornière où il s’est enferré. La réflexion qui concerne la santé devra forcément être élargie vers la redéfinition de notre modèle social. Le chef de l’Etat souligne qu’on n’est qu’au début de la crise sanitaire. On l’est aussi pour le séisme économique qui lui est lié et qui ne s’arrêtera pas à la fin de l’épidémie. La France, comme les autres pays touchés par le Covid-19, joue sa survie dans un monde qui sera forcément plus dur.