Mélanges improbables quitte la scène

ASSOCIATIONS. Clap de fin pour Mélanges improbables. Organisatrice de concerts de jazz, blues, rock et musiques du monde depuis une quinzaine d’années, l’association fondée par Philippe Chanclu sera dissoute en novembre prochain. Une page se tourne.

« C’est une décision mûrement réfléchie ». Depuis deux ans, en réalité. Et les multiples sollicitations des mélomanes venant à chaque concert n’ont pas infléchi la volonté de Philippe Chanclu. Son bébé, Mélanges improbables, porté sur les fronts baptismaux il y a une quinzaine d’années, va cesser ses activités. La dissolution devrait être prononcée lors de l’assemblée générale extraordinaire qui se tiendra vendredi 3 novembre, à 19 h, à la salle Fernandel. Des assises qui seront faites dans les règles maison : avec apéritif dînatoire et, surtout, de la musique. Beaucoup une musique. Pour la dernière fois.

« Les membres du Bureau ont très bien compris ma décision. J’ai demandé si quelqu’un voulait reprendre le flambeau. Personne ne s’est proposé », explique Philippe Chanclu. Qui n’en conçoit aucune déception : « C’est peut-être mieux ainsi. Mélanges improbables, c’est notre bébé. C’est un label et on arrive au bout d’une histoire, faite de magnifiques amitiés, de belles soirées et de grands concerts. A d’autres d’en écrire une nouvelle ».

« En quinze ans, j’ai dû coller 6 000 affiches. Je n’ai plus de colle ! »

Une accumulation, au fil des années, d’éléments épars explique la décision de Philippe Chanclu. Qui, globalement, ressentait désormais une sorte de lassitude, pour ne pas dire de contrainte : « On ne se rend forcément pas compte de l’investissement que c’est : faire la programmation, aller trouver des groupes, voir avec leurs agents, aller chercher les subventions, monter les dossiers… En quinze ans, j’ai dû coller 6 000 affiches. Et c’est fini, je n’ai plus de colle ! J’ai envie de prendre ma retraite et de profiter ».

D’autres faits l’ont conforté dans son choix : la fin du local emblématique de L’Epicerie, rue Cardinal-Morlot, dont il ne s’est jamais réellement remis, la disparition d’une grande figure de l’association, Pascal Ozaine, en 2022, qui a plongé toute l’équipe dans l’affliction, ou encore la Charte de l’engagement républicain, qu’il a été obligée de signer pour continuer à avoir le droit d’être subventionné et qu’il réprouve au plus haut point. « On me demande de signer un engagement… Je vois surtout un retour à l’ordre moral, des pressions politiques sur les créateurs, des concerts encadrés par les forces de l’ordre… A Langres, on en est pas encore là mais le contexte ambiant est présent ».

Quinze ans de grands moments

Mais Philippe Chanclu préfère surtout retenir l’essentiel, et ces quinze années au service de la musique à Langres, amenant de grands noms, notamment du jazz, dans la cité de Diderot. Pêle-mêle, il cite volontiers Archie Shepp, les Violons barbares, ou encore le trio Charlier-Winsberg-Sourisse, parmi les quelque 180 dates organisées par l’association. Il se félicite aussi d’avoir tenté l’aventure du festival “Jazz à La Lunette” au fort de la Lunette 10, en 2016 et 2017. « La première édition a pas trop mal fonctionné. Mais la seconde, avec la pluie et le froid, a été une catastrophe. On a dû arrêter ».

Comme toute association culturelle, forte de bénévoles passionnés et engagés, Mélanges improbables aura effectivement connu beaucoup de hauts et quelques bas. Mais pour tous les mélomanes, les nombreux fidèles venant à chaque concert ou les spectateurs les plus occasionnels, c’est bel bien une grande page culturelle à Langres qui s’apprête à se tourner. Après un dernier tour de piste le 3 novembre.

N. C.

n.corte@jhm.fr