“L’Ourson”, l’ode au cinéma de Chantal Pelletier
Chantal Pelletier s’exerçait jusque-là avec bonheur dans le genre policier, des romans pleins de verve et d’humour. Pour ce cinquième ouvrage, « L’Ourson« , elle plonge dans un genre très différent : la biographie romancée qu’elle pimente de beaucoup d’imagination et d’originalité.
Le récit tout entier est une ode au cinéma. Il s’ouvre en 1984 à Paris sur l’évocation de la mort de François Truffaut. La narratrice a grandi dans les salles obscures et travaille aux archives du Centre national du cinéma où elle se nourrit de toutes sortes de films dont ceux d’Orson Wells qu’elle admire profondément.
Anne Duchet a vécu un drame dans son enfance qu’elle n’a jamais surmonté et se définit comme un être insignifiant, transparent, qui n’intéresse personne. Une rencontre providentielle et inimaginable va bouleverser, sa vie : celle d’un homme âgé, « grand, obèse, impressionnant, démesuré », Orson Welles en personne venu solliciter son aide, lui demander de faire des recherches pour alimenter son prochain scénario ! Elle peine à y croire : « Je pensais trop pour être avec lui. D’ailleurs, avec qui étais-je exactement ? Le metteur en scène de théâtre, de cinéma, l’acteur, le personnage ? Le génie infréquentable, séducteur, manipulateur tyrannique, mégalomane ? »
Au hasard des recherches, auxquelles elle se consacre aussitôt, elle dresse un portrait très réaliste de ce personnage mythique dont elle évoque toutes les œuvres. Et le lecteur s’attache aussi au sort de cette femme qui lutte pour ne pas sombrer dans la folie et que cet événement va obliger à sortir de ses réserves, à se mettre en danger.
Quelle est la part du vrai ? La part du faux ? Où est la fiction ? Où est la réalité ? Difficile à dire… Il reste une impression bien rendue, le croquis d’un artiste de génie, à la personnalité si forte, au charisme si envoûtant que peu lui ont résisté, un ogre qui vous dévore mais aussi un ourson qui vous charme de ses fragilités. Un grand artiste quoi qu’il en soit.
De notre correspondante Françoise Ramillon