Les Ogres auront toujours vingt ans
En 1994, Alice, Mathilde, Fred et Sam Burguière couraient bars, squats et trottoirs afin d’exprimer, en famille, leur amour pour chanson à texte, rock indépendant et musique du monde. Dix ans plus tard, les Ogres de Barback fêtaient dix ans de scène en compagnie des joyeux drilles de la Fanfare du Belgistan. Après avoir donné plus de 1500 concerts et écoulé plus de 600 000 albums, attachés à partage et indépendance, les Ogres de Barback ont fêté leur vingt ans à travers France à l’occasion d’une tournée triomphale. Entourés de la Fanfare Eyo’nlé et de nombreux artistes, frères et sœurs donnent la pleine mesure de talent, ferveur et délicatesse à l’écoute d’un double album live mariant créations originales et reprises de Mano Solo, Allain Leprest, Christian Olivier, Anne Sylvestre et autres figures de la chanson française.
Après avoir fêté vos dix ans accompagnés de la Fanfare du Belgistan, vous célébrez vos vingt ans en compagnie de la Fanfare Eyo’nlé. Comment s’est orchestrée cette nouvelle collaboration ?
Alice : «Cette rencontre a eu lieu par le plus grand des hasards dans le cadre d’un festival, dans le Sud de la France, nous les avons vu jouer dans la rue et nous avons adoré. Nous étions attendus sur scène, nous leur avons demandé une carte, vite fait, à l’arrache, sans avoir le temps de nous découvrir. Quand nous avons commencé à nous pencher sur notre projet, nous avons pensé à eux. Ils ont accepté de nous rencontrer et nous avons commencé à travailler quelques morceaux ensemble. Nous nous sommes tout de suite dit que tout allait très bien se passer avec eux et nous sommes partis au Bénin pour répéter en leur compagnie et donner un premier concert, avant de revenir en France en leur compagnie. (…) Notre collaboration a véritablement pris forme avec la sortie de l’album “Vous m’emmerdez” et nous nous sommes lancés tous ensemble dans une tournée, nous avons fait une cinquantaine de dates avant de célébrer nos vingt ans.»
Vous aviez fêté vos dix ans en compagnie de Pierre Perret, Néry ou Manu Chao et vous êtes à nouveau entourés de nombreux artistes avec qui vous reprenez notamment des textes de Mano Solo et Allain Leprest. La sélection de ces textes a-t-elle été difficile à établir ?
Alice : «Pas plus que ça ! Ces chansons nous tiennent à cœur, nous sommes sur les mêmes longueurs d’ondes avec mes frères et ma sœur, tout s’est fait assez naturellement en compagnie des invités. Certains nous ont proposé des choses, nous leur en avons proposées d’autres et nous sommes rapidement tombés d’accord ! Les Hurlements de Léo ont développé un projet de reprises de Mano Solo, la Rue Kétanou et d’autres artistes ont un rapport très fort avec Allain Leprest, nos influences sont communes, il était donc logique de rendre une forme d’hommage à Allain Leprest ou Mano Solo.»
Les relations de famille sont souvent tendues. Vous semblez échapper aux orages…
Alice : «Nous ne nous engueulons pas comme peuvent le faire des frères et sœurs, nous nous entendons bien depuis le début, nous sommes passés au delà des petites querelles d’enfants, nous avons tout simplement pris l’habitude de travailler ensemble. Nous n’habitons plus dans les mêmes régions, nous avons chacun notre vie privée, cette distance nous permet de prendre plaisir à nous retrouver lorsque nous sommes en répétition ou partons en tournée.»
Vos engagements transpirent de vos créations. Comment vous vous situez-vous dans le contexte actuel ?
Alice : «Nous avons toujours essayé de faire passer des messages, nos concerts ne sont pas anodins et nous défendons certains engagements. Nous nous exprimons sans véritablement nous considérer comme des artistes véritablement engagés, le poids de ce statut est à mon sens trop lourd à porter.»
Albums offerts à petites et grands, tournées, collaborations, projets personnels… Vous filez à un rythme infernal. Travaillez-vous d’ores et déjà sur un nouveau projet ?
Alice : «Nous allons profiter de notre première véritable période de repos ! Nous n’avons pas observé de pause depuis vingt ans, mais cette situation n’empêche pas Sam de développer différents projets dont un basé sur des reprises de Barbara. Fred a également décidé de reprendre des chansons de Renaud comme il l’avait déjà fait il y a dix ans. Nous les filles, nous faisons autre chose. Ma sœur fait par exemple un bébé ! Nous commençons toutefois à penser à la reprise, mais une reprise plus tranquille, nous avons chacun une vie de famille et il est plus compliqué d’imaginer nous replonger dans de grosses tournées comme nous l’avons fait ces vingt dernières années.»
Propos recueillis par Thomas Bougueliane