Les grands absents – L’édito de Patric Chabanet
Il suffit de regarder les reportages télévisés sur le grand débat national pour s’en convaincre : les jeunes ne sont pas là. Ce n’est donc pas un hasard si le chef de l’Etat a prévu, dans son agenda, de les rencontrer aujourd’hui en Saône-et-Loire. Cette désertion de la jeunesse ne date pas d’aujourd’hui. Elle se manifeste de manière croissante dans les élections, y compris la présidentielle, par une abstention largement supérieure à celle du corps électoral. Visiblement, les jeunes sont moins motivés que leurs aînés par la chose politique. C’est pourquoi la comparaison facile établie entre la crise actuelle et mai 68 n’a aucun sens. Il y a 51 ans, c’étaient les jeunes qui étaient descendus dans la rue, à commencer par les étudiants. Aujourd’hui, les universités ne se sentent pas globalement concernées par le mouvement des Gilets jaunes.
Il faut dire que les thématiques mises en avant dans les revendications portées dans les manifestations et les cahiers de doléances ne les concernent pas dans l’immédiat : le pouvoir d’achat et la revalorisation des retraites. Leur premier objectif est de trouver un job, lui seul capable de les intégrer dans la société. Or, avec un taux de chômage souvent supérieur à 20%, les 18-25 ans n’osent même pas imaginer à quelle date ils pourront prendre leur retraite et quel sera le montant de leurs pensions. Tout est là, dans cette fracture qui sépare le pays de sa jeunesse. On comprend dès lors que l’idée de prendre en compte le vote blanc, d’ajouter une dose de proportionnelle dans les législatives, d’instaurer le non-cumul des mandats, de supprimer le sénat, passe au-dessus de la tête des nouvelles générations. Les partis politique, pendant longtemps, se sont habitués au phénomène. Maintenant, ils rajeunissent leur organigramme. Mais la réalité est là : les jeunes ne sont pas contre le système, ils s’en désintéressent. Un mal plus pernicieux qu’une franche hostilité