Les éleveurs laitiers dans une situation irréversible en Haute-Marne
Conjoncture éleveurs. Deux réunions simultanées ont eu lieu en préfecture ce 11 mai. L’une concernait la sécheresse et l’autre, les conséquences de la hausse des charges dans les fermes. L’ensemble des participants s’est accordé à dire que les éleveurs laitiers sont les plus pénalisés.
Syndicats agricoles, organismes stockeurs, coopérative, marchand d’aliments, MSA, banque et assurance, tous étaient autour de la table de la préfète ce 11 mai afin d’évoquer la situation des exploitations agricoles de Haute-Marne après plus de deux mois de guerre en Ukraine.
Même s’ils considèrent tous que la guerre en Ukraine « a bon dos » et que l’augmentation des prix des matières premières et des charges est davantage due à la spéculation, ils se sont accordés pour dire que « le secteur le plus touché est le secteur laitier ».
« Les éleveurs laitiers sont en situation d’urgence »
Jean-Luc Vauthier, l’un des participants et gérant de Vauthier Sepac en lien avec Sepac Compagri, résume la situation en quelques chiffres : « La hausse des charges (aliments avec + 200 € la tonne, carburants, plastique…) a engendré la hausse du coût de production de 95 € pour 1 000 litres. Or, au mieux, certaines laiteries ont augmenté le prix du lait de 40 € les 1 000 litres. Il manque donc 50 € ». Et que dire des éleveurs qui travaillent avec des laiteries qui ne valorisent pas en beurre et poudre et qui plafonnent à + 20 € ?
« les difficultés vont s’accentuer »
Jean-Luc Vauthier résume : « Les éleveurs laitiers sont en situation d’urgence. Les difficultés vont s’accentuer et seront bientôt irréversibles ». Sébastien Riottot, le président de la FDSEA, parle de dizaines de milliers d’euros qui manqueront chaque semestre. Il prévoit une catastrophe : « Nous manquons déjà de viande bovine en France et, dans ces conditions, nous manquerons bientôt de lait et la filière qui va avec pourrait disparaître ».
D’ailleurs, logiquement, du fait du manque de viande bovine (- 100 000 en deux ans) et donc de l’offre, les participants notent la hausse des prix de vente à la ferme qui compensent la hausse des charges. La situation est similaire en grandes cultures avec la hausse des cours du blé, orge et colza.
Perte de repères
Jean-Luc Vauthier fait remarquer que « dans ce contexte instable, les agriculteurs ont perdu leurs repères. Ils sont déstabilisés ». Manifestement pas seulement eux puisqu’il s’amuse de voir que les banques ne perçoivent pas les dégâts actuels.
Sébastien Riottot estime qu’il est désormais encore plus compliqué de concilier contraintes et production dans les fermes. « Arrêter des productions comme le colza ou la viande, les agriculteurs peuvent le faire mais peut-être faut-il se poser les questions des besoins. Tout ce qui paraissait évident hier ne l’est plus ». Il souhaite remettre au centre des débats la valeur travail et la production. Alors, lorsqu’il voit les diplômés d’Agro Paris Tech dénoncer l’agriculture productiviste, il s’irrite de « ces Parisiens qui n’y connaissent rien au moment où l’alimentation est appelée à manquer ».
Sébastien Riottot salue l’esprit constructif de cette réunion en préfecture. Il conclut : « Avec le manque de poulets, le manque de viandes bovines et bientôt le manque de lait, il ne faut plus tirer sur la corde ». Jean-Luc Vauthier espère que ces données remonteront au nouveau ministre de l’Agriculture comme la préfète a promis de le faire.
Frédéric Thévenin
Vigilance sécheresse
Le comité de ressources en eau mené par la préfète a signifié que le déficit pluviométrique qui se poursuit depuis le mois de septembre 2021 (- 27 % par rapport à la normale) induit une sécheresse météorologique, ainsi qu’une sécheresse des sols pénalisante pour la végétation. La situation hydrologique et hydrogéologique n’est pas encore catastrophique, mais des difficultés peuvent déjà se faire sentir ponctuellement.
La préfecture le dit : « Si la situation ressemble aux scénarios des années précédentes, l’année 2021 nous a montré que les mois de mai et juin peuvent inverser les tendances. En revanche, si le déficit pluviométrique se poursuivait, cela engendrerait une sécheresse comme nous avons pu en connaître par le passé ».
Anne Cornet, préfète de la Haute-Marne, encourage tous les acteurs à limiter, d’ores et déjà, leur consommation d’eau. Si la situation hydrologique continue à se dégrader, les mesures de restrictions des usages de l’eau pourraient être imposées. La préfète conclut : « Chacune et chacun d’entre nous doit observer des comportements responsables ».
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