Les boucles d’art d’Henri-Pierre Jeudy

Les « Boucles temporelles », toute dernière création collective imaginée par Henri-Pierre Jeudy, mêlant photos, écrits et sons, sont à découvrir jusqu’au 17 mars au musée.

On le connaît philosophe, sociologue et écrivain. Henri-Pierre Jeudy est aussi artiste. Une partie de son art, de son être, sont à découvrir dès ce vendredi 19 janvier au musée, où cet habitant de Cirey-sur-Blaise a posé sa patte, son imagination et sa folie, à travers  ses « Boucles temporelles ».

Pour chaque exposition temporaire, deux des trois salles du deuxième étage sont transformées. Mais comme il ne fait rien comme tout le monde, Henri-Pierre Jeudy a amené sa scénographie dès la pièce principale, à côté de la collection de beaux-arts du site bragard. « Pour casser le souvenir du musée, cette partie inamovible, j’ai demandé à ce que l’on installe la momie (pièce phare des lieux, ndlr) ici, à côté des collages qui symbolisent sa complexité et sa mémoire. La momie, c’est l’éternité de la mémoire. » Voilà pour la mise en bouche, au sens figuré.

Au sens propre, il y aura évidemment un vernissage ce vendredi à 17 h, pour admirer donc ces collages signés Maria-Claudia Galera. Mais comme il ne fait rien comme tout le monde, Henri-Pierre Jeudy évoque volontiers le « termissage », le 17 mars, également à 17 h, pour clore l’expo. « C’est une manière de transposer certaines œuvres et donner un final autre », indique Didier Albisser, qui a imaginé tout le montage sonore de l’exposition et la mise en scène de cette pièce à laquelle le public est invité à prendre part. Rendez-vous au musée, puis au théâtre, quelques jours avant le printemps.

« Le temps a l’air de passer mais ne passe jamais »

Avant cela, place aux « Boucles temporelles ». Un travail collectif donc, qui voit aussi les deux nièces de l’artiste, Isabelle et Nathalie Jeudy, présenter des créations, à l’instar de Charles Paulicevich, photographe belge qui a immortalisé des instants de vie de la famille Jeudy, dans son quotidien le plus basique. L’artiste fige des scènes ordinaires de personnes ordinaires et qui semblent arrêter le temps. Semble, c’est le mot… « L’histoire d’un territoire se construit avec la mémoire d’un paysage. Les personnes et les lieux reviennent au rythme d’un temps qui ne passe pas en laissant toujours des traces qui s’associent comme des images », indique Henri-Pierre Jeudy dans son texte de présentation.

Réflexions sur le temps, le monde, la vie, la mort, la place de chaque individu, la mémoire des lieux. « La « boucle temporelle », ce temps qui semble revenir sur lui-même, n’est pas la simple répétition de ce qui arrive dans la vie, elle fait figure de destin. » Dans cette expo, la mémoire complexe, intemporelle, folle, vient se confondre avec celle de l’intime. Voilà pour la petite salle. Dans la grande, les choses intimes sont projetées dans l’espace public. De l’homme qui creuse sa grotte à Ambonville, à la dame aux poupées, Henri-Pierre Jeudy met en scène pudiquement, presque cachés, « ces personnages curieux qui créent des lieux insolites ».

N’allez pas forcément chercher du sens à tout cela. Car les « curieux » qu’a rencontrés l’artiste et les curiosités qu’il a mises en scène, ça n’a parfois « absolument aucun sens, c’est ce qui est extraordinaire », assure l’intéressé. « On est dans l’atemporalité. Comment l’intime arrive dans l’espace public. » Au musée en l’occurrence, avec « trois registres ensemble » : l’image photographique, l’écriture poétique et la voix, la musique et les bruits environnants. Et pour le choix du titre ? « La boucle temporelle, c’est que la boucle n’a pas de fin, elle est cyclique. le temps revient sur lui-même ; il a l’air de passer mais ne passe jamais », conclut l’artiste, qui a proposé cette création à Clément Michon. Pour le conservateur, cette exposition se veut être « une œuvre d’art qui se fait écho avec d’autres œuvres du musée ».

N. F.