Le respect de la fonction – L’édito de Patrice Chabanet
Il savait que son jeune âge était présenté par ses adversaires comme la certitude de l’inexpérience. Emmanuel Macron a montré hier qu’il apprenait vite. Il n’a commis aucun impair le jour de son investiture. Il a eu l’élégance de raccompagner à sa voiture un François Hollande qui, lui, avait snobé son prédécesseur. Ses détracteurs lui avaient reproché son manque de densité régalienne. Il a tenu à remonter les Champs-Elysées dans un véhicule militaire pour montrer que dans un pays en état d’urgence la tunique de chef des armées devenait essentielle. Visiblement, le nouveau chef d’Etat a essaimé sa journée de messages et de symboles destinés à faire savoir qu’il n’entendait pas être un président «normal». De la même manière, il a fait totalement allégeance à la Ve République, en citant tous ceux qui l’ont précédé à l’Elysée. Une façon d’afficher un profond désaccord avec les partisans d’une VIe République. Ce matin, les flonflons d’une cérémonie réussie vont céder la place au dur de la réalité. Cela passe notamment par la nomination du Premier ministre. Le nom du maire du Havre, Edouard Philippe, est régulièrement cité. Mais, à la différence de l’ère hollandaise, rien n’a filtré. Emmanuel Macron veut rester maître des horloges. Et maître des décisions tout court. Dans son dis-cours d’investiture, il a laissé clairement entendre, une nouvelle fois, qu’il appliquerait les réformes de son programme électoral. C’est justement là qu’il sera attendu et jugé. La France est plus fracturée que jamais, comme il l’a reconnu lui-même. Le discours sur la nécessaire réconciliation ne suffira pas. Il lui faudra une solide majorité ou une coalition fiable pour contrer d’éventuels mouvements sociaux d’envergure. Son ascension rapide et inédite plaide pour lui. Sera-t-il, enfin, celui qui saura réformer le pays sans le mettre sens dessus dessous ? Sans considération partisane, il faut l’espérer. S’il échoue, la France glissera dans le toboggan de l’aventure.