Le prix de la vie – L’édito de Christophe Bonnefoy
Il avait 45 ans. Et affichait des états de service impressionnants. Mais pas pour la gloire de pouvoir aligner les médailles. Le lieutenant-colonel Arnaud Beltrame avait une autre philosophie de vie. Celle qui place dans la balance sa propre existence pour préserver celle de ses concitoyens. Qui s’efface devant la nécessité de faire rempart à toute forme de violence. Au terrorisme en l’occurrence. Tout naturellement, comme une évidence.
Depuis hier matin et l’annonce de son décès, c’est le mot “héros” qui revient presque systématiquement, dans la bouche des politiques comme dans celle des anonymes. Les uns comme les autres n’oublieront jamais qu’un jour de mars 2018, un homme a pris la place d’un otage en sachant pertinemment qu’il avait de très fortes probabilités de tutoyer la mort. Que le jihadiste qu’il avait face à lui n’attendait que cela : abattre le symbole que peut représenter un gendarme.
L’autoproclamé soldat de Daesh – un pion parmi d’autres – a ôté trois autres vies en ce funeste vendredi. Ces victimes, non plus, ne doivent pas être oubliées. Leurs familles ont aussi besoin des témoignages de solidarité.
Mais en tout état de cause, elles se poseront les mêmes questions que tout le monde a déjà à l’esprit, même si les réponses sont loin d’être faciles. Comment, une fois encore, un individu pourtant fiché S a-t-il pu passer à l’acte ? Comment peut-on entendre aujourd’hui que les autorités n’avaient pas décelé de signes de radicalisation suffisants ? Depuis 2015, la mise en place de mesures anti-terroristes a sans doute permis de sauver de nombreuses vies. Mais, la preuve, ces mesures ne sont pas infaillibles. C’est, aussi, ce sentiment qui inquiète. Et qui laisse penser, en toute logique, que le combat contre l’obscurantisme durera encore des années.