Humeur de F. Thévenin – Le monde agricole pris à la gorge
A la guerre que vient de déclarer la Russie à l’Ukraine et indirectement au monde occidental, l’arme la plus fatale et la plus dévastatrice sera sans doute l’économie. Quelques minutes après le début du conflit, le baril du pétrole dépassait les 100 $ et les spécialistes parient sur les 125 $ très rapidement. Deux raisons à cela : des stocks au plus bas et les sous investissements des pays occidentaux. Voilà comment des continents entiers se mettent à la merci d’un dictateur en puissance trop longtemps ignoré et sous-estimé.
Il en est de même avec le gaz. Les réserves françaises sont à 30 % de ses capacités en cette fin d’hiver mais il va falloir les reconstituer pour l’année prochaine et les pays du nord de l’Europe auront bien du mal à satisfaire tout le monde.
La situation n’est pas différente en agriculture. Alors que l’Europe et surtout la France rechignent à produire de la viande, du lait, des céréales, des fruits et des légumes au nom de normes environnementales toujours plus délirantes, la Russie a, depuis 2014 et son immersion dans le Donbass ukrainien, construit son agriculture à grand coup de subventions. La France met à terre son agriculture pendant que Poutine labourait ses terres et construisait des fermes de lait pour effacer toutes dépendances.
Résultat : la Russie produisait 32 millions de tonnes de blé en 2014 et, en 2021, elle était à 80 millions de tonnes. De dépendant aux autres comme acheteur, il est devenu leur bourreau en vendant. Pas étonnant que les cours du blé, des protéines, du colza se soient envolés en quelques heures avec des impacts directs sur l’alimentation du bétail et donc sur la viande et le lait. Les cotations ont été bloquées. Il en va ainsi pour les engrais.
Poutine tend son bras économique et tient à la gorge le reste du monde et, en premier, les pays pauvres qui seront les premières victimes d’éventuelles pénuries. Alors, en construisant son destin mortifère, Poutine, loin d’être fou, se contrefout des menaces d’embargo. En brandissant l’arme militaire et l’arme économique, ses ambitions expansionnistes se révèlent au grand jour mais elles existaient depuis son arrivée au pouvoir. Et ça, tous les dirigeants du monde auraient été bien inspirés d’en prendre compte en ne le laissant pas dans son coin et en assurant leur indépendance énergétique et alimentaire.
Frédéric Thévenin
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