Le mobilier des églises disparues du Der est-il en danger ?
Sauvé des eaux il y a plus de 50 ans, le mobilier des églises de Champaubert et Chantecoq est-il aujourd’hui en danger ? C’est ce que pense Daniel Dautel, greeter au lac du Der. La commune et l’association du souvenir s’en défendent.
« Pour moi, ce mobilier est à l’abandon depuis plus de 50 ans ! » Daniel Dautel n’y va pas par quatre chemins. Greeter au lac du Der, il connaît le secteur sur le bout des doigts. « Mon grand-père avait une ferme à Giffaumont, et j’ai été enfant de chœur à Landricourt. » Alors, forcément, quand il est question des églises des villages engloutis et plus précisément de leur mobilier, Daniel Dautel se mobilise. « Tout le mobilier de Nuisement-aux-Bois a suivi l’église au Village-Musée du Der, à Sainte-Marie-du-Lac », explique-t-il. Mais pour celui des églises de Champaubert-aux-Bois et Chantecoq, c’est une autre histoire.
« Tout est enfermé là, comme en prison, et le public ne le sait pas »
« Juste avant que le Der ne soit mis en eau, les maires avaient de nombreuses affaires à régler. La Ville de Paris a alors financé deux chapelles dans le cimetière de Giffaumont et on a dit : “On va mettre le mobilier là pour le protéger et on verra plus tard” », raconte Daniel Dautel. Cinquante ans plus tard, statues, autels, chemins de croix et autres objets y sont toujours, à l’abri des regards. « Tout est enfermé là, comme en prison, et le public ne le sait pas », déplore le greeter. « L’association du souvenir des villages disparus et la mairie de Giffaumont sont indifférentes et se renvoient la balle. »
A qui appartient ce mobilier ?
Depuis des mois, Daniel Dautel se bat donc pour faire reconnaître la propriété de ce mobilier. « En 1905, la loi a donné la propriété des églises et de leurs biens aux communes. En 1971, les trois villages ont été rattachés à la commune de Giffaumont, qui a donc, de fait, récupéré les églises », estime Daniel Dautel. Pour Jacky Rousseau, adjoint au maire de Giffaumont, « cela devrait appartenir à la commune, mais on n’a pas de document qui le précise ».
Du côté de l’association, on estime qu’il y a un flou. « Je pensais que cela appartenait à la mairie, mais apparemment, c’est plus compliqué que ça. Les chapelles appartiennent à Giffaumont, mais ce qu’il y a dedans, c’est plus ambigu… », lance Christian Collot, son président.
Du mobilier a disparu
Au-delà de la question de la propriété, c’est aussi la sauvegarde de ce patrimoine qui inquiète Daniel Dautel. « Les conditions de conservation ne sont pas idéales », note-t-il. « Pire, certains éléments ont disparu ! » Un inventaire réalisé en mars 2022, comparé à un premier datant des années 1960, a en effet révélé que des objets avaient mystérieusement disparu : un fauteuil, deux statues, un bâton de confrérie… « Aujourd’hui, si on ne fait rien, dans 20 ans, il n’y a plus rien ! », alerte Daniel Dautel. Mais pour la mairie, aucun problème, « tout est en lieu sûr, fermé à clé et entretenu par la commune », insiste Jacky Rousseau.
Alors quel avenir pour ce mobilier méconnu ? L’an prochain, le lac du Der célèbrera les 50 ans de sa mise en eau. De nombreux événements devraient être organisés pour l’occasion. L’association du souvenir prépare déjà une exposition, mais Christian Collot « ne souhaite pas déplacer les objets (notamment les statues, Ndlr) pour ne pas les endommager. Pour l’instant, ça reste là, comme l’ont souhaité nos anciens. » En attendant, Daniel Dautel entend bien continuer son combat. Et ce dès la prochaine assemblée générale de l’association, dans quelques semaines.
P.-J. P.