Le film de la journée
Les Eclaronnais/Valcourtois ont vécu une journée extraordinaire, hier, malgré la défaite. Pour autant, en dépit du contexte, ils n’ont rien voulu changer à leurs habitudes. Récit d’un rituel qui avait fait ses preuves jusqu’alors.
10 h 30
Il manque encore quelques joueurs à l’appel, dans l’établissement qui accueillera les Eclaronnais/Valcourtois pour le déjeuner d’avant-match. Mais ils ne vont pas tarder à arriver. Jean-Luc Humbert et Didier Sergent avaient décidé de réunir leur groupe au complet en milieu de matinée, comme depuis le début de la coupe de France.
10 h 55
Les deux entraîneurs sont les derniers arrivés. En attendant, les joueurs échangent, se chambrent dans la bonne humeur. La tension n’est pas encore palpable. La plupart des Eclaronnais/Valcourtois en profitent pour lire le journal. Ils savent que demain, dans le quotidien de la Division d’Honneur, les projecteurs auront baissé en ampérage.
11 h 15
La table est dressée, l’équipe est prête à passer à table. On ne change pas les habitudes. Mêmes plats, mêmes rituels : crudités, viande rouge, purée de pommes de terre fraîche, fruits.
12 h
Le repas touche à sa fin. Jean-Luc Humbert a rejoint depuis le début du déjeuner la table des joueurs et discute avec eux. Les plaisanteries vont bon train mais déjà, le ton a changé. Didier Sergent, lui, a l’estomac noué. Impossible d’avaler quoi que ce soit. Comme d’habitude. Un verre d’eau, quelques bouchées pour dire, même pas de café.
12 h 15
Les entraîneurs s’entretiennent quelques minutes dehors. On décompresse, on parle du foot, de la pluie et du beau temps. Philippe Cordero, l’entraîneur du Saint-Dizier Basket, est de la causerie. Il est le propriétaire, avec son épouse, du restaurant bragard et entretient des liens d’amitié depuis longtemps avec le club de foot éclaronnais.
12 h 40
La tension est déjà montée d’un cran. L’heure tourne et l’événement approche. Tout le monde est pressé de se rendre au Stade Charles-Jacquin. Jean-Luc Humbert voudrait bien encore patienter un peu, pour ne pas plonger trop rapidement dans une ambiance qui risque de déconcentrer le groupe trop tôt. Le convoi s’élance pourtant en direction du stade.
12 h 50
Déjà, des dizaines de supporters attendent devant les barrières. Les vigiles veillent, la sécurité ne va pas tarder à ouvrir les portes et à fouiller les spectateurs. Les joueurs arrivent et sont acclamés comme il se doit.
13 h 10
Les supporters installent leurs banderoles, vêtus de bleu et de jaune et parfois peints aux couleurs d’Eclaron/Valcourt. Tout l’après-midi de la veille, ils se sont activés pour décorer le stade, terminer de confectionner leur tifo, accrocher les ballons jaunes et bleus.
13 h 20
Les joueurs se préparent dans les vestiaires. Tout est silencieux. Les visages sont fermés, concentrés. Eclaron/Valcourt prend la mesure de l’événement et de l’enthousiasme qu’il a généré. Didier Sergent et Jean-Luc Humbert débutent alors une longue causerie, d’abord tournée vers le conditionne- ment mental des joueurs, puis davantage sur le côté tactique du match. Pas un mot dans le vestiaire. Didier Sergent est un orateur, un leader de groupe. «On ne mourra pas aujourd’hui !», clame-t-il. «On doit vivre cet événement pleinement, profiter, oser, tenter. Et si on doit perdre, on le fera dans la dignité. On n’est pas des ‘pimpins’. Dijon va nous respecter et nous, on va les secouer. C’est compris ?».
13 h 35
Le groupe remonté à bloc, Jean-Luc Humbert prend le relais pour décrypter le système tactique de Dijon, observé à Angers, lors de la dernière journée de championnat. Cadenasser Souyeux et Morisot. Surveiller Linares, souvent chef d’orchestre. Se méfier des coups de pied arrêtés et des duels aériens vus les grands gabarits dijonnais. Exploiter le côté gauche de Jarjat, prétendument plus faible. Sauf qu’il ne joua pas, finalement…
14 h
Il est temps d’aller s’échauffer. Le Stade Charles-Jacquin est plein comme un œuf. Les supporters dijonnais chantent à tue-tête. Les arbitres sillonnent le terrain. Didier Sergent distille ses derniers conseils.
14 h 30
Dernières secondes avant de s’élancer sur la pelouse. Les visages sont fermés. Mahfiche ouvre le cortège, côté éclaronnais. Le protocole démarre. Nous y sommes.
16 h 15
Philippe Kalt siffle la fin du match. La fin du rêve, aussi, pour des Eclaronnais/Valcourtois surclassés athlétiquement, mais qui ont eu le mérite de ne jamais baisser les bras. Dijon échange quelques maillots. Il n’y a pas d’effusion côté bourguignon. Les Haut-Marnais sont réconfortés par les dirigeants éclaronnais/valcourtois et vont saluer la tribune bondée qui le leur rend bien. L’émotion est vive, Eclaron/Valcourt savoure l’échange, malgré la déception. Yohann Tartare craque même comme pour évacuer une pression trop longtemps contenue.
16 h 50
Le club-house est plein à craquer. Philippe Kalt reçoit quelques félicitations, discute quelques instants avec Didier Sergent et Faruk Hadzibegic, le coach dijonnais, signe aussi quelques autographes. Jean Rimbert profite de l’occasion pour faire un petit discours, saluant la qualification dijonnaise, le soutien de la Ville de Saint-Dizier, dont le Maire est présent, et trinque avec l’entraîneur dijonnais. L’aventure est terminée. Mais qu’elle était belle !
Delphine Catalifaud