Le chantier qui divise – L’édito de Patrice Chabanet
Il y a des chantiers emblématiques, non pour leur prouesse technologique, mais pour les polémiques qu’ils déclenchent. C’est le cas de l’autoroute A 69 qui doit relier Castres à Toulouse. Ce week-end les adversaires du projet sont bien décidés à faire entendre leurs voix. Dans le calme ? Les organisateurs ont promis une manif festive. Une promesse qui ne convainc pas le ministre de l’Intérieur qui voit dans ce rassemblement le « prochain objectif de l’ultragauche ». Gérald Darmanin se souvient surtout de ce qui s’était passé à Sainte-Soline. Pour l’exécutif, pas question de voir se multiplier ces happenings de violence pure.
Cette affaire de l’A69 constitue une preuve supplémentaire de la radicalisation qui s’invite dans le débat public. En l’occurrence ce sont deux logiques qui s’affrontent. Celle du progrès technique et celle de la protection de la nature. Celle d’un transport plus rapide et plus sécurisé, et celle de la préservation de centaines d’arbres et du refus de l’artificialisation des sols. La confrontation de ces deux approches est légitime dans une démocratie comme la nôtre. Mais de là à hystériser le débat, il y a souvent un mauvais pas qui a été franchi.
Le courant écologiste n’est pas homogène. Lui aussi est traversé par des courants extrémistes. La création d’une ZAD – leur objectif à peine caché – peut être dénoncée sans être accusé de mettre en péril la démocratie française. Au XIXe siècle, quand le réseau ferroviaire s’est mis en place, il y avait de bonnes âmes bardées de certitudes qui affirmaient sans sourire que sur leur passage les trains à vapeur allaient provoquer l’asphyxie des passagers dans les tunnels. Confucius nous le rappelle : « C’est un tort égal de pécher par excès ou par défaut ».
p.chabanet@jhm.fr