Le cafouillage fait salon – L’édito de Patrice Chabanet
Il fallait que cela arrive. Après quatre décennies de crises ouvertes ou larvées, l’agriculture française se cabre au moment où commence le Salon qui lui est consacré. Il aura suffi d’un cafouillage à l’Elysée pour provoquer un fiasco, avant même l’ouverture officielle de ce grand rendez-vous annuel. On peut se demander d’ailleurs comment des membres de l’entourage présidentiel ont pu commettre cette « connerie », inviter à une table ronde les « Soulèvements de la Terre », une organisation plus douée dans le maniement du cocktail Molotov que dans celui de la fourche. A croire qu’à l’ENA on évite d’apprendre aux futurs hauts fonctionnaires les subtilités de la politique. Le résultat est là.
La FNSEA a déclaré forfait, suivie de Michel-Edouard Leclerc. Emmanuel Macron n’a pas eu d’autre choix que d’annuler la table ronde, mais pas sa présence au Salon. Le chef de l’Etat est réputé pour aimer les confrontations. Il sera servi. L’organisation calamiteuse de cette table ronde en dit long sur la fébrilité d’un exécutif qui ne sait plus comment manier ce dossier explosif qu’est la crise agricole. Une aubaine pour les responsables de la profession qui, visiblement, sont bien décidés à profiter de leur avantage tactique.
Dans ces conditions, il est particulièrement difficile, et hasardeux, d’entrevoir la suite du film. Durcissement ou poursuite des négociations en coulisses ? Pour les agriculteurs, le danger qui les guette est l’ivresse des succès et leur popularité impressionnante dans l’opinion publique. Cette dernière est versatile.