La tradition séculaire de la bataille des vents
Dans la nuit du 24 au 25 janvier, à une heure du matin, selon les croyances, les vents se défient. Celui qui domine donnera le ton de la météo de l’année : c’est la bataille des vents. En Haute-Marne, un seul rendez-vous : celui donné par l’association « Histoire et Patrimoine », au menhir de la Haute-Borne.
C’est une tradition rattachée à la conversion de Paul de Tarse, qui persécute les disciples de Jésus avant de se revendiquer apôtre de ce dernier. Il devient dès lors l’une des figures majeures de la diffusion du christianisme. Converti donc, et devenu Saint Paul, la tradition le surnomme l' »apôtre des gentils ».
Dans la nuit du 24 au 25 janvier, on le célèbre donc, mais surtout, on interroge le vent. « Autrefois, les hommes rejoignaient le point culminant de leur zone d’habitation, vêtus de longues chemises appelées « panais ». En plein courants d’air, il suffisait de considérer la direction prise par les chemises, comme des drapeaux », explique Marie-Claire Gaspard, présidente de l’association Histoire et Patrimoine. L’association tient à faire perdurer, sur le site de Fontaines-sur-Marne, cette tradition antique qu’est la bataille des vents.
Le relevé, effectué au bâton, à l’écharpe et à la boussole sur le site du menhir de la Haute-borne revêt une double symbolique : « saluer » le dieu Eole et le menhir. Selon la légende, il serait en réalité le fuseau d’une fée lorraine un peu trop pressée. Dans sa course folle direction les moulins de Rachecourt-sur-Marne, la fée perd son fuseau à filer qui tombe de son sac, sur le chemin de l’ancienne voie romaine. Ainsi serait né le menhir. Soit, nous n’y étions pas.
De la pluie en perspective
Le menhir date du néolithique (environ 4 000 ans) et a gardé la trace, notamment par les gravures, de l’imposante cité romaine « Le châtelet » bâtie non loin. Et sans doute, la trace de quelques coups de vent.
Les relevés de cette 34e édition soulignent un vent dominant ouest / nord-ouest. Autant dire, fraîcheur et pluie. Ce relevé de la bataille, non scientifique et non revendiqué comme tel, ne fait pas office de généralité mais de tendance dominante, pour l’année en cours. Tradition ancestrale ou pas, légende ou folklore pour d’autres, les résultats communiqués par diverses équipées batailles des vents sur l’hexagone s’avèrent justes dans 70 à 90 % des cas.
Marie-Claire Gaspard profite de ce moment pour rappeler, lors de la marche qui mène au menhir, les légendes locales au sujet du roi Eole : « Le vent peut sortir d’un gouffre, d’un trou ou d’une grotte. Un jour, un homme poursuivait un blaireau jusque dans son terrier. Creusant et recreusant ce trou, il finit par faire sortir le vent qu’on n’a jamais pu arrêter. » Ou encore : « On disait, que les animaux, comme les femmes, pouvaient être fécondés par l’esprit du vent. Dès lors, les mères de famille jetaient de l’orge ou du blé devant leur maison par grand vent pour détourner son attention des jeunes filles… ».
Qu’il fasse la météo, ou les bébés, le vent est à considérer, et il fera bien ce qu’il veut. L’année 1999 s’en souvient encore. Marie-Claire Gaspard aussi.
Elise Sylvestre