La somme de 110 000 € saisie à Val-de-Meuse
TRIBUNAL CORRECTIONNEL. Deux ressortissants néerlandais ont été interpellés par les Douanes, le 6 février 2022, sur l’aire autoroutière de Val-de-Meuse, suite à la découverte de 110 000 € dans une cache aménagée. Le voyage en Espagne a pris fin en salle d’audience. L’addition est salée.
Le voyage de deux ressortissants néerlandais a subitement pris fin à quelques kilomètres de Pouilly-en-Bassigny, là où la Meuse prend source, là où de nombreux touristes prennent plaisir à s’arrêter. Timothy M.* et Richard R.* espéraient s’arrêter en Espagne. Femmes et enfants à la maison, des vacances au soleil, entre potes, avec 110 000 € d’argent de poche, de quoi s’adonner pleinement aux plaisirs de la bamboche.
Petit problème : assistés d’une traductrice, les deux hommes auront répété, vendredi soir, à la barre du tribunal correctionnel, ne pas avoir eu connaissance de la présence dans le véhicule « prêté par une connaissance » d’un magot dissimulé dans une cache aménagée.
Argent sale
L’affaire a pour origine un contrôle opéré, le 6 février 2022, sur l’aire autoroutière de Val-de-Meuse, par des fonctionnaires des Douanes.
La présence d’une discrète cache aménagée dans le tableau de bord du véhicule est rapidement identifiée par ces professionnels.
Quatre téléphones portables sont découverts. Et six paquets recouverts d’un épais adhésif. Cannabis, héroïne ? Des billets. Par centaines. Des billets de 50, 100 et 200 € conditionnés, sous vide, dans des sachets thermosoudés. Les douaniers ont fait les comptes. La somme de 110 000 € a été découverte.
De l’argent sale. Forcément. Trafic de stupéfiants, prostitution, traite d’êtres humains et autres activités de réseaux criminels génèrent d’importants flux financiers. Si l’argent circule via des établissements bancaires peu regardants basés dans des paradis fiscaux, si le recours à la cryptomonnaie est de plus prisé des trafiquants, les importants volumes d’argent liquide générés par les trafics continuent de circuler d’un pays à un autre via des passeurs.
De simples vacanciers ?
Transporter sans déclaration préalable plus de 10 000 € d’argent liquide est illégal. La dissimulation d’une cache aménagée tend à attester de l’origine frauduleuse des fonds. Et, comme a tenu à le rappeler le substitut du procureur de la République Djindian, en matière de blanchiment, la présomption l’emporte comme le précisent diverses jurisprudences. A la tête d’un salon de coiffure, marié, père de famille, jusqu’alors inconnu de la justice, Richard R. se serait vu proposer par « une connaissance » le prêt d’un véhicule. L’identité de cet homme ? Le prévenu aura refusé de la communiquer malgré la courtoise insistance de madame le président Courcet-Devaux. « Ami de salle de sport », Timothy M. aurait profiter de l’occasion pour partir passer quelques jours au soleil. Le profit du prévenu aura retenu l’attention du ministère public. Spécialisé dans la rénovation de logements, au chômage depuis six mois, « à cause de la Covid », propriétaire de deux maisons en location, disposant de « 3 700 € » de revenus mensuels, concédant investir dans la cryptomonnaie, manifestement suspecté, aux Pays-Bas, d’avoir été en lien avec un trafic de stupéfiants comme semble l’indiquer la note d’un magistrat néerlandais transmise aux autorités françaises, le père de famille s’est rendu en Espagne au mois de janvier. Grâce à des données communiquées par douaniers belges et néerlandais, le véhicule où ont été retrouvés les 110 000 € avait transité de l’Espagne vers les Pays-Bas dans le même temps.
Timothy M. et Richard R., « choqués par la découverte » d’une telle somme, n’en auront pas démordu. « Nous ne pouvions pas nous douter ». « Pour déclarer qu’on transporte de l’argent, encore faut-il savoir qu’on en transporte, pour prêter son concours à une opération de blanchiment, c’est la même chose », tonna Me Lalloz au nom d’un des des prévenus. Les prévenus auront échappé à des peines de prison ferme avec mandat de dépôt requises par Alexandre Djindian. L’addition est toutefois salée. Condamnés à six mois de prison avec sursis, chacun des prévenus devra honorer trois amendes d’un montant global de 75 000 €. Timothy M. et Richard R. sont, en outre, visés par une interdiction de paraître sur le territoire français d’une durée de cinq ans.
T. Bo.
* Conformément à une règle interne à la rédaction, seules les identités des prévenus condamnés à une peine de prison ferme sont mentionnées dans nos colonnes.