La longue quête de la statue de Bartholdi
HISTOIRE. La statue réalisée par Auguste Bartholdi trône au centre de la place Diderot depuis 140 ans. L’auguste hommage au plus célèbre des Langrois semble, aujourd’hui, aller de soi. Il n’en allait pourtant pas ainsi à l’époque…
Il tourne, comme du juste, le dos à la cathédrale Saint-Mammès, son regard se posant avec bienveillance vers l’horizon. Alors que les engins de chantier ont commencé leur long travail de réhabilitation et de réaménagement de la place qui porte son nom, Denis Diderot demeurera immuable, comme depuis 140 ans, sur son socle certes de moins en moins blanc.
La statue érigée par Auguste Bartholdi, le concepteur de la célèbre Statue de la Liberté de New York, en 1884, est un hommage au plus illustre des Langrois qui, aujourd’hui, fait la fierté unanime des habitants. A l’époque, le symbole n’allait pourtant pas de soi, loin s’en faut. Le projet a d’ailleurs coupé Langres en deux, et les débats ont fait rage pendant… plusieurs décennies. En cause, la puissance encore très forte de l’évêque de Langres et du parti catholique. Qui vouaient encore une haine féroce au fondateur de L’Encyclopédie.
La première idée de construction d’une statue remonte aux années 1830-1840. Mais elle restera longtemps lettre morte. Il fallut attendre 1880, et l’élection comme maire de Langres de Jean-Ernest Darbot, un républicain de tendance gambettiste, pour que le projet ne se débloque. Le nouveau premier magistrat débaptise la place Chambeau, pour la nommer Diderot, et veut y installer la statue incarnant le grand homme pour 1884, à l’occasion du centenaire de la mort du philosophe.
La course contre-la-montre est alors lancée et, après les obstacles politiques, c’est la quête financière qui s’avère ardue, surtout lorsqu’un sculpteur de l’envergure de Bartholdi est sélectionné. La Ville abonde, l’Etat aussi, mais il manque au pot. Le conseil municipal de Darbot a alors une double bonne idée : faire appel au grand Victor Hugo pour réunir des donateurs, ce que l’auteur des Misérables accepte d’accomplir, et au tsar de Russie Alexandre III, au nom de la grande amitié ayant uni Diderot et Catherine II. Celui-ci envoie l’obole qui manquait. A la plus grande joie des Langrois d’aujourd’hui.
N. C.