La Haute-Marne d’hier racontée par des historiens amateurs d’Oudincourt
Histoire. Un couple d’historiens amateurs d’Oudincourt s’était promis de retracer le passé de notre département depuis la Révolution française. Leur septième et dernier livre vient de sortir !
Ils ont mis plus de 20 ans à boucler ce septième tome. Jean-Louis et Marie-Claire Mougin racontent la Haute-Marne d’antan, jusqu’à la Première guerre mondiale. C’est en 2001, Jean-Louis Mougin, ornithologiste au Muséum d’Histoire naturelle, prend sa retraite. Il passe désormais son temps en grande partie à Oudincourt où se trouve sa maison familiale. « J’ai constaté qu’il existait fort peu d’ouvrages restituant le passé de la Haute-Marne », indique ce passionné d’histoire. En duo avec son épouse, il va donc hanter les archives départementales. Ils écrivent deux tomes qui racontent spécifiquement le village d’Oudincourt. Quatre autres volumes seront nécessaires pour faire revivre les 21 hameaux de l’ancien canton de Vignory entre 1694 et 1918. Ne manquait plus à ce passionnant puzzle qu’une seule pièce : un ouvrage traitant de la première moitié du XIXe siècle. C’est désormais chose faite avec “Le Triomphe des classes moyennes”, qui ressuscite cette période agitée où la France connaît deux républiques, un empire et trois royautés. « Les Haut-Marnais semblent avoir accepté ces bouleversements politiques sans trop d’états d’âme, et c’est précisément ce que nous voulions savoir », précisent les auteurs. « Notre souhait n’était pas de faire de l’histoire au niveau des couronnes et des Etats, mais d’ausculter les mœurs et les mentalités des villageois de 1800 confrontés à la prise de pouvoir de la grande bourgeoisie, à la modernisation de l’agriculture, au développement du rail, des chemins vicinaux et des canaux, à la légalisation du divorce, à la scolarisation des filles… »
Ainsi les auteurs ressuscitent-ils, avec précision et humour, le monde des Haut-Marnais de jadis : tisserands, scieurs de long, bergères, tonneliers, laboureurs, vagabonds, maîtres de forges, leur garde-robe, leur habitat, leurs traditions mais aussi leurs espoirs et peines. Des aléas climatiques aux querelles de voisinage, des malversations électorales aux crises sanitaires plus ou moins bien gérées (ah, le choléra de 1832, son “comité sanitaire”, son médecin aussi renommé qu’incompétent, ses médicaments trop rares envoyés trop tard par les autorités !), les lecteurs s’immergeront avec plaisir dans le quotidien de leurs lointains aïeux…
De notre correspondant Philippe Vaudin
“Le triomphe de la classe moyenne” (Premier Empire, Restauration et Monarchie de Juillet dans l’ancien canton de Vignory). Jean-Louis et Marie-Claire Mougin le dédicaceront aux Puces d’Oudincourt le 1er mai. Sur commande au 06.69.33.22.83 ; courriel : mouginmc@yahoo.fr.
Trois questions à Marie-Claire et Jean-Louis Mougin
Pourquoi parsemer votre livre de portraits hauts en couleur ?
« Vers 1800, nous croisons en effet dans le canton de Vignory une pauvre mère infanticide, un curé belliqueux, un garde-forestier particulièrement filou, un illustre médecin envoyé de la capitale dont “le traitement est fatal à tous les patients, sauf à ceux qui ne le prennent pas”. Ces portraits en disent long à la fois sur la période évoquée et sur l’espèce humaine, de plus ils prêtent à sourire. Comme l’affirme le philosophe Michel Foucault, “l’histoire, c’est tout de même prodigieusement amusant !”. »
Pourquoi avoir choisi de clore en 1918 votre saga sur le département ?
« Pousser plus loin nos recherches nous aurait amenés à parler de périodes sensibles comme l’Occupation, et à évoquer des gens que nous avons connus, ou dont les enfants sont toujours en vie. Or, tout le monde ne souhaite pas se retrouver dans un livre… »
Ce sera donc votre dernier ouvrage ?
« Sauf si une nouvelle idée germe. En attendant, nous allons davantage profiter de la belle campagne haut-marnaise, et moins des archives départementales de Choignes, dont le personnel nous a toujours réservé un accueil parfait et auquel nous souhaitons rendre hommage : comme l’écrivait André Malraux, il n’y a pas de geste plus respectable que “d’arracher quelque chose à la mort”. »