La guerre souterraine
Les combats à ciel ouvert – c’est le cas de le dire avec les missiles et l’artillerie longue portée – nous font oublier les actions plus discrètes et très efficaces : les éliminations physiques des responsables ennemis, les fameuses « opérations homo » menées par les services secrets. Daria Douguina, fille d’un idéologue d’extrême droite proche de Poutine, en a fait les frais. Elle a été tuée dans l’explosion de son véhicule. A l’évidence c’était son père qui était visé. Etrangement, il avait changé de véhicule au dernier moment.
Hier soir, toutes les hypothèses étaient sur la table. On pense bien sûr à l’action d’un service ukrainien, histoire d’impressionner l’opinion publique russe, à quelques dizaines de kilomètres de Moscou. Mais à quoi bon agir ainsi quand sur le terrain le sort des armes penche en faveur de l’Ukraine. On peut imaginer aussi un règlement de comptes au sein du camp russe. Certains estiment que le jusqu’au-boutisme, comme celui prôné par Alexandre Douguine, mène la Russie tout droit à l’échec.
Dans ce contexte où s’entremêlent guerre classique et roman d’espionnage l’Ukraine est en train de passer à la vitesse supérieure. Kiev n’a plus seulement pour objectif le Donbass, mais la libération de la Crimée, un véritable totem pour le Kremlin. Reste à connaître l’essentiel : la réaction de l’énigmatique Poutine. « Nous devons être suffisamment forts pour résister à toute provocation », a prévenu Volodymyr Zelensky. Un accident, qui ne serait pas vraiment un accident, pourrait se produire dans la centrale nucléaire de Zaporijjia. Les guerres ne déroulent jamais une histoire déjà préétablie. Elles ouvrent toujours des chapitres inédits.
Patrice Chabanet