La crainte du pire – L’édito de Christophe Bonnefoy
Il n’y a guère que la réalité des chiffres qui semble incontestable. Plus de 130 morts, vendredi soir, dans l’odieuse attaque d’une salle de spectacles en toute proche banlieue de Moscou.
Car pour le reste, on pourrait presque dire que tout sonne faux, de l’immédiate revendication de l’attentat par l’Etat islamique, en passant par l’arrestation on ne peut plus rapide des terroristes ou le scénario qu’a vite commencé à dessiner Vladimir Poutine. Tout sonne faux… mais se révèle tellement logique et prévisible, finalement…
L’attaque de la part de Daech n’a rien de surprenant en soi. La Russie est depuis longtemps la cible des terroristes islamistes, Histoire oblige. Mais on peut légitimement se demander comment un pays – une capitale même – particulièrement dur(e) et pointu(e) en matière sécuritaire, et encore plus paranoïaque depuis l’invasion en Ukraine, n’a pu, ni voir venir l’attaque, ni a fortiori l’empêcher. D’autre part, Vladimir Poutine, lors de son premier discours d’après-attentat, a aussitôt tourné les yeux vers Kiev, en suggérant que les assaillants s’apprêtaient à passer la frontière vers l’Ukraine, où ils auraient d’ailleurs eu des relais, ou pour le moins des contacts, d’après le Président russe.
Vraie attaque de l’Etat islamique mais réponse d’opportunité de la part de Poutine ? Possible. Et indéniablement en tout cas, pour le Kremlin, une “auto-justification” à intensifier sa guerre – puisqu’il la nomme désormais ainsi – contre l’Ukraine. Et plus largement à durcir le ton, quel que soit l’interlocuteur. Que réserve le proche avenir… ? Impossible de le prévoir, même si on peut se douter qu’il sera on ne peut plus incertain.