Joué d’avance – L’édito de Patrice Chabanet
Le moins qu’on puisse dire, c’est que le référendum qui se tient ce week-end en Nouvelle-Calédonie n’a pas passionné les foules en métropole. Il n’a même pas été happé par le chaudron de la campagne présidentielle qui fait de tout sujet un objet de polémique. Trop loin, trop compliqué et sans impact sur le quotidien des métropolitains. Il faut dire que le résultat est pratiquement acquis d’avance : les indépendantistes ont refusé de participer au scrutin au motif que la pandémie ne leur a pas permis de faire une campagne « équitable ». Ce troisième référendum qui clôt un processus défini il y a 30 ans souffrira forcément d’une contestation immédiate, s’il débouche à nouveau sur un rejet de l’indépendance, et cela d’autant plus que le deuxième montrait une progression du vote indépendantiste.
Prudemment, Emmanuel Macron s’est bien gardé d’intervenir dans le débat insulaire. Pas de « vive la Calédonie française », mais l’assurance qu’il y aura « une vie ensemble » au lendemain du scrutin. C’est ce qu’on appelle marcher sur des œufs. En fait, le mutisme de l’exécutif cache une certaine inquiétude : qu’un jour ou l’autre, pas tout de suite, la Nouvelle-Calédonie tombe dans l’orbite chinoise. Pékin ne dissimule pas en effet son intérêt pour un territoire gorgé de ressources, à commencer par le nickel. Sa localisation, pas très loin de l’Australie en fait aussi un atout stratégique sur son flanc sud dans la zone Indo-Pacifique. Or tous les experts patentés estiment que l’avenir politique de la planète se jouera là dans les décennies à venir.
La France se doit donc de conserver une présence dans ce secteur, même si elle est symbolique (quelques centaines de militaires). Le retrait des indépendantistes lui accorde objectivement un répit. Un délai à mettre à profit pour réduire les inégalités entre les communautés. Faute de quoi, les Chinois qui ont l’oreille de certains dirigeants indépendantistes feront tomber l’île dans leur escarcelle.