Joseph-Pamphile de Hédouville, médaillé de Sainte-Hélène
Le 12 août 1857, l’empereur Napoléon III décerne la médaille de Sainte-Hélène à tous les vétérans français et étrangers, encore vivants, ayant servi la France de 1792 à 1815. Environ 400 000 anciens combattants de la Grande Armée sont concernés, dont Joseph-Pamphile de Hédouville, qui réside alors à Sommermont (commune de Chatonrupt-Sommermont).
Le 18 juin 1815, l’affaire de Waterloo se présente mal côté français : le maréchal de Grouchy poursuit les Prussiens de Blücher, battus l’avant-veille à Ligny par Napoléon Ier, sans les trouver. Finalement, il surprend leur arrière-garde à Wavre, à la mi-journée, sans réaliser que le combat majeur se situe sur sa gauche, au Mont Saint-Jean, d’où provient le son du canon. Napoléon y malmène l’armée de Wellington, composée de Britanniques, Néerlandais et Hanovriens, contrés deux jours plus tôt au carrefour des Quatre-Bras par le maréchal Ney. Or, c’est l’avant-garde prussienne qui débouche sur le champ de bataille de Waterloo, l’après-midi, alors que l’aile droite du dispositif français, 38 000 hommes, est absente.
La dernière charge de cavalerie, sous les ordres de Ney, concerne le 2e Régiment de carabiniers à cheval, magnifique unité d’élite.
Le lieutenant Joseph-Hubert de Hédouville (1781-1840), cavalier expérimenté originaire de Sommermont, est blessé. Son jeune cousin germain, le maréchal des logis (sergent) Joseph-Pamphile de Hédouville (1794-1860), natif de Vitry-le-François, vient tout juste d’être mobilisé dans le même régiment pour cette campagne de Belgique. Dans la furie des combats, il passe son sabre au travers du corps d’un cavalier prussien qui, entraîné par son cheval, emporte cette arme au loin : Joseph-Pamphile a oublié d’en passer la dragonne ! Après sa convalescence durant laquelle il s`est marié à Suzannecourt, Joseph-Hubert rejoint l’école de cavalerie de Saumur, créée par Louis XVIII, avec le grade de capitaine. Joseph-Pamphile est affecté à Versailles, comme maréchal des logis au Ier régiment des grenadiers à cheval de la Garde royale. Le nom des Hédouville apparaît aux croisades, tandis que cette famille originaire du Vexin français fournit 59 officiers à l’armée entre 1610 et 1900. Les deux cousins de Waterloo appartiennent à la branche de la seigneurie de Minecourt, mais leur oncle, le général comte Gabriel de Hédouville, est issu de la maison de Serval aujourd’hui éteinte. Il soutient Joseph-Pamphile pour qu’il intègre les gardes du corps du roi, ce qui ferait de lui un officier, mais l’intéressé refuse. Effrayé à l’idée de côtoyer une riche noblesse, il ne souhaite pas changer son mode de vie. Il passe son temps dans les tavernes et les cabarets, se bat en duel et perd des grades qu’il doit regagner.
Joseph-Pamphile se marie à Sommermont
Ayant quitté l’armée, Joseph-Pamphile se marie à Sommermont le 22 mars 1826 avec sa cousine germaine Victoire-Louise de Hédouville. Née au village le 9 mai 1790, elle est la fille du vicomte Jean-Hubert de Hédouville (1749-1835), seigneur de Minecourt et de Sommermont, premier maire de la commune en 1790, et de Marguerite-Françoise d’Epis. C’est la sœur de Marie-Gabriel de Hédouville, second maire de Sommermont, et de Joseph-Hubert de Hédouville qui prend sa retraite en 1826 également, et intègre le conseil municipal du village. Il y devient maire à son tour en 1827 jusqu’à son décès en 1840. Désireux de faire fructifier le bien de sa femme, Joseph-Pamphile s’avère peu doué pour l’agriculture. Il doit abandonner ses initiatives sous peine de compromettre le patrimoine de son épouse qui ne lui donne pas d’enfant. Assagi à Sommermont, devenu sociable, l’ancien duelliste retrouve sa plénitude dans la pratique religieuse en l’église Saint-Maurice. Il est encore présent au village en 1857, lorsqu’il est décoré de la médaille de Sainte-Hélène. Il meurt à Paris trois ans plus tard, d’une crise d’apoplexie (AVC), alors qu’il visite sa sœur Mme Laboullays.
Les autres décorés de la commune
Les autres vétérans de la commune, ayant reçu la médaille de Sainte-Hélène en 1857, sont, pour Sommermont : François Vallot né en 1793, caporal au 8e Bataillon de sapeurs ; Nicolas Maréchal né en 1793, chasseur. Pour Chatonrupt : Joseph Salignat né en 1777, 44e Régiment de ligne ; Louis-Nicolas Husson, 67e Régiment de ligne ; Pierre Honoré né en 1780, 3e Régiment de hussards.
De notre correspondant Patrick Quercy
Sources : généalogies de la famille de Hédouville et de la médaille de Sainte-Hélène, archives municipales de Chatonrupt-Sommermont.