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Henri Botton, un Juste dans le Pays du Der

Un chantier forestier parmi d’autres : celui de Blinfey, près de Beurville. (Archives club Mémoires 52).

Constructeur dans les années 30 du premier bassin du Der, cet ingénieur de la Ville de Paris a également contribué, sous l’Occupation, à sauver des juifs employés dans son chantier forestier de Champaubert.

En forêt domaniale du Der, sur le territoire de l’ancienne commune de Champaubert-aux-Bois (Marne), existait, sous l’Occupation, un chantier forestier. Il portait le numéro 1 854. C’était, avec celui d’Hallignicourt, l’un des chantiers gérés par un ingénieur de la Ville de Paris : Henri Botton.

Pas totalement oublié par les historiens (lire l’encadré), le chantier 1 854, dirigé par Paul Picot, présentait la particularité d’accueillir des juifs, la plupart natifs des pays de l’Est, domiciliés dans le Nord ou à Paris. Le 18 juin 1942, huit Parisiens sont ainsi partis pour la région dervoise. Au 25 août, ils étaient 49 « israélites » à y être employés. Tous étaient placés sous la responsabilité de l’ingénieur Botton, afin de fabriquer du charbon de bois.

Certificat de résistance

Né dans la capitale le 12 juillet 1906, Henri Botton était arrivé à Eclaron dans les années 30. Sa mission était de construire le premier bassin de ce qui allait devenir, 40 ans plus tard, le lac du Der-Chantecoq.

Discret, Henri Botton l’était assurément. L’essentiel de ses activités, nous les connaissons par un « certificat de résistance » rédigé par Lucien Pinet, responsable du Front national de lutte pour l’indépendance de la France (FN) en Haute-Marne. Ce résistant rappelle qu’entre 1940 et 1944, l’ingénieur « établit de faux papiers d’identité pour des prisonniers évadés puis, plus tard, pour des réfractaires au STO et des juifs qu’il soustrait aux recherches ennemies et prend personnellement en charge au centre de Champaubert ». En décembre 1942, Botton employait 99 personnes dans ce chantier. Officiellement, selon un rapport de la préfecture de la Haute-Marne, il n’y avait pas de juifs…

Reconnaissance française

Membre du groupe d’Eclaron dirigé par le lieutenant Michel Marin, Henri Botton « fut un résistant authentique auquel je me plais à rendre hommage pour les services incontestables qu’il rendit à la cause de la Résistance française », écrit Lucien Pinet.

Henri Botton était revenu en 1996 à Giffaumont pour un événement familial. Il est décédé en 2003 dans la région parisienne. S’il n’a pas reçu la médaille de la Résistance, ni le statut de Juste parmi les nations, il était par décret du 27 novembre 1946 titulaire de la médaille de la Reconnaissance française pour faits de résistance, dans la même promotion que le docteur Jean-François Bonnet (qui a donné son nom à l’hôpital de Riaucourt) ou le garagiste chaumontais Marius Martin.

Lionel Fontaine

Sources : archives du club Mémoires 52 ; documents conservés par les Archives départementales de la Haute-Marne sur les persécutions antisémites ; article du Journal de la Haute-Marne paru en 1996.

Ils ont échappé aux rafles

Les historiens marnais Jocelyne et Jean-Pierre Husson ont évoqué le chantier de Champaubert dans leurs travaux. Ils précisent qu’il employait 51 personnes en septembre 1942, puis seulement 23 en janvier 1943. Ces juifs employés comme bûcherons ont été dirigés là par le Commissariat à la lutte contre le chômage, institué par Vichy. Ils n’étaient pas surveillés, sauf, de loin, par les gendarmes de Saint-Rémy-en-Bouzemont quand des évasions étaient signalées. Ainsi, dix juifs se sont échappés en octobre 1942, et onze autres en février 1943, pour éviter l’internement à Drancy. 

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