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Récolte de grains de moutarde

Vis ma vie d’agriculteur : premières récoltes de moutarde chez Agrinov

Récolte de grains de moutarde
A 52 ans, Cédric Pelletier recherche constamment de nouveaux défis.

La société Agrinov a semé en septembre 2022 ses premiers plans de moutarde. Rencontre avec ses salariés pour le premier jour de récolte.

« Rendez-vous à 9 h 30 à l’exploitation. Les jeunes seront là plus tôt, mais moi, j’ai des papiers à faire avant ». Bien, chef. A 52 ans, Cédric Pelletier est salarié-cadre d’exploitation agricole. Cette année, c’est la deuxième récolte qu’il supervise pour Agrinov, société née il y a deux ans de l’association de trois exploitants. JHM Quotidien l’a rencontré mardi 11 juillet à la ferme de Jean-Philippe Frossard, à Laville-aux-Bois.

Cédric ajuste les grilles du séparateur.

Cédric arrive avec son fils Kylian, employé comme saisonnier pour les moissons. Dimitri, salarié permanent et Benjamin, le deuxième saisonnier, sont en effet déjà perchés sur la moissonneuse-batteuse, en plein nettoyage. Car la journée est un peu spéciale. Cédric s’apprête à récolter des graines de moutarde, une première. Alors, pas question qu’il reste des résidus de céréales ou de colza sur le matériel.

Deux ou trois heures de nettoyage sont donc nécessaires pour les deux moissonneuses-batteuses et les bennes. Côté ferme, il faut aussi aspirer les résidus de céréales de la récolte précédente, restés dans la fosse, et vérifier les cellules de stockage. Après cinq jours de moissons, les grains devront en effet être stockés pendant six jours sur place avant d’être livrés à un organisme stockeur.

Kylian, saisonnier, vérifie la coupe pour éviter les incendies.

Entre orages et risque d’incendies

Vers 10 h, Hugo, l’apprenti, arrive avec la deuxième benne. L’équipe est au complet et pour Cédric, l’heure est aux recommandations. Depuis quelques semaines, impossible de commencer une journée sans évoquer les incendies. Pas un jour sans qu’une moissonneuse-batteuse ne prenne feu. Dimitri et Benjamin nettoient donc la paille issue des récoltes précédentes et huilent le matériel pour éviter les surchauffes. « Si ça arrive, vous partez. Un homme, c’est un homme, une machine, c’est une machine », préconise Cédric.

Kylian va quant à lui vérifier la coupe qui sera fixée sur la moissonneuse. Ensuite, il faut s’en tenir à la vigilance du salarié qui récolte, comme l’explique Cédric : « L’incendie peut survenir lorsqu’un caillou se coince dans une section de la lame. La casse entraîne des étincelles et il faut tout de suite s’arrêter. Mais parfois, c’est trop tard ».

Autre inquiétude du jour : l’alerte orage relayée la veille, lundi 10 juillet, par la préfecture. Cédric jette un œil sur « Sencrop », une application qui l’informe en temps et en heure des précipitations sur les différentes parcelles, via des stations météo connectées. Rien d’infaillible toutefois : un violent orage le surprend à 14 h, après seulement une heure de moissons. Fin précoce, donc, pour la récolte.

Opérations délicates

Cédric vérifie que les graines sont bien séparées des déchets.

Car si la sécheresse est l’ennemie numéro un des cultivateurs, l’humidité ne fait pas non plus bon ménage avec les moissons. Avant de récolter, Cédric commence par prendre un échantillon d’un litre pour l’envoyer à l’organisme stockeur. « Le taux d’humidité doit être en-dessous de 9 %, sinon ils n’acceptent pas le lot », précise-t-il. Le risque est alors que des bactéries ou des insectes se développent. Le taux devra également être maintenu dans les cellules de stockage de la ferme, par une température basse et une bonne ventilation.

L’échantillonnage permet aussi au cultivateur d’adapter les réglages de la moissonneuse à cette nouvelle culture. « Vue la petite taille des graines, les réglages sont plus délicats », observe-t-il. Il faut choisir des grilles de bonne taille et régler les vents de façon à séparer les grains des déchets – principalement du gaillet – qui contribuent aussi à faire monter le taux d’humidité.

Dimitri, 25 ans, nettoie la fosse avant d’accueillir la récolte.

Quand rien ne se passe comme prévu

Comme ce n’est pas suffisant, la récolte est renettoyée à la ferme, avant le stockage en cellules. André Frossard, le père du propriétaire, vient apporter son aide. Un séparateur permet ainsi de séparer grains, gaillet et poussière. Là aussi, l’opération est délicate : « On ne peut pas aspirer le gaillet avec la soufflerie car il est plus lourd que les grains de moutarde. On jetterait la récolte avec ! », explique Cédric.

Vers 12 h, Benjamin rentre des silos où il était parti porter l’échantillon. Tout est fin prêt. Il résume : « C’est une journée type, justement parce que rien ne s’est passé comme prévu ».

Solène Clausse

De la moutarde en Haute-Marne ? On vous explique pourquoi

Au printemps 2022, il était parfois bien difficile de trouver des pots de moutarde dans les rayons de nos supermarchés. En cause : l’importante sécheresse subie en 2021 par le Canada, premier fournisseur mondial de graines de moutarde. Face à la pénurie, l’Association des producteurs de graines de moutarde de Bourgogne (APGMB) a ouvert les contrats aux producteurs français.

Si la production de moutarde a triplé en Côte-d’Or entre 2021 et 2022 selon Le Bien public, elle s’est étendue aux départements voisins… dont la Haute-Marne. Une opportunité saisie par Agrinov, que Cédric présente comme un « avantage financier » certain. « L’objectif était d’investir dans une culture à plus grande valeur ajoutée ».

Il ajoute que la moutarde n’a pas représenté de coûts de production plus importants. Un cahier des charges très strict doit cependant être respecté pour cette culture homologuée, notamment sur la présence de déchets ou d’insectes.

Et la sécheresse en Haute-Marne dans tout ça ?

« Le rendement dépend de la réserve hydrique », explique Cédric, qui confie être « directement confronté au changement climatique ». Les sols du sud-ouest de la Haute-Marne ont une composition spécifique au Barrois champenois. Comme l’explique Cédric, ce sont des argilo-calcaires superficiels. Plutôt recherchés des vignerons – dont les cultures aiment peu l’eau stagnante – ils le sont moins des autres cultivateurs du fait du peu de profondeur de la réserve d’eau.

Alors d’après Cédric, le manque d’eau n’arrange rien : « Il n’y a pas de solution miracle, mais on cherche constamment des cultures moins gourmandes en eau, comme des blés plus rustiques ». Le colza ou la moutarde en font partie. A l’inverse, de 30 à 40 hectares de maïzena auparavant, Cédric n’en cultive plus qu’une dizaine. Les tournesols aussi, très gourmands en eau, posent parfois souci.

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