Halte au feu ! L’édito de Patrice Chabanet
Pour paraphraser la formule d’un humoriste algérien, Fellag, « cette fois-ci, on ne touche plus le fond, on creuse ». Avec la claque administrée à Emmanuel Macron, la violence politique a franchi une nouvelle étape. Ce n’est pas l’homme qui a été frappé, mais tout ce qu’il représente : la République, ses institutions, notre modèle démocratique, le peuple. Un électrochoc. La classe politique ne s’y est pas trompée. Elle a fait chorus pour condamner cet acte imbécile, mais très révélateur d’un lent délitement, même s’il ne faut pas être dupe des arrière-pensées. Notre pays est englué dans une campagne électorale permanente. Les insultes, les vociférations, les insinuations tiennent lieu de débats. La violence des mots a souvent été présentée comme un moindre mal. C’est oublier que de la violence des mots à la violence physique, il n’y a qu’un petit pas. C’est oublier aussi que depuis quelques mois toute une série d’attaques ont été menées contre le domicile de certains élus. Que des menaces de mort sont régulièrement proférées sur les réseaux sociaux. Que, tout récemment, le président de la région Grand Est, Jean Rottner, a été enfariné. Que Jean-Luc Mélenchon a prétendu de sombres manipulations du terrorisme destinées à peser sur le scrutin de la présidentielle.
Face à ce déferlement de tous ordres, un mot d’ordre s’impose : halte au feu ! L’avenir nous dira très rapidement si la condamnation unanime d’hier est plus qu’un effet d’annonce. Ou si des justifications serviront bientôt à couvrir l’injustifiable, du style « Il l’a bien cherché ». De deux choses l’une. Soit la classe politique, et la société aussi, se ressaisissent. Soit l’agression d’hier n’est que le début d’une série détestable. En d’autres termes, soit la démocratie reprend le dessus, soit elle ne contrôle plus rien, livrée à la haine et au ressentiment. Les paris restent ouverts.