“Godzilla x Kong : Le nouvel empire”, les monstres se foirent
Cinquième long-métrage du MonsterVerse de Warner Bros., “Godzilla x Kong : Le nouvel empire” est une essoreuse du bon goût. Aussi mal amené que pensé, le film d’Adam Wingard abandonne toute profondeur, et ne parvient même pas à être un chouette divertissement sans prise de tête.
Un accident industriel. Dégueulis numérique dont le scénario n’a pas été digéré, “Godzilla x Kong : Le nouvel empire” compte sur sa mythologie pour remplir les poches de producteurs dont l’avidité n’égale que le mauvais goût. La force des films de monstres, du “King Kong” originel de Merian C. Cooper et Ernest B. Schoedsack au tout récent – et génial – “Godzilla Minus One” de Takashi Yamazaki, en passant par l’électrisant “Pacific Rim” de Guillermo Del Toro, est de servir de métaphores à des peurs bien humaines.
En somme, d’utiliser des créatures titanesques pour renvoyer les spectateurs à leurs terreurs les plus intimes. La solitude, la guerre, la maladie… Mais ici, le sous-texte est aux abonnés absents (notons que même le texte s’est fait la malle tant les dialogues semblent sortis de l’esprit farceur d’un collégien). Et rien ne sauve réellement le film d’Adam Wingard du naufrage.
Tout pour la bagarre
Le bon – ou plutôt le pas complètement naze – existe dans ce long-métrage. À commencer par la castagne. La force démesurée de King Kong, Godzilla et leurs adversaires ou alliés, se fait ressentir au moindre impact. Les combats entre titans sont grisants, leur potentiel destructeur montré à plein. Habiles, surtout lorsqu’elles impliquent les singes géants, les chorégraphies pâtissent d’une caméra parfois hésitante mais restent survitaminées.
L’affection du réalisateur pour l’anthropomorphisme simiesque donne lieu à de jolis moments, mais dessert les kaijū, dont Godzilla, qui voit son temps d’écran minoré. La bande-son de Junkie XL et Antonio Di Ioro fait le boulot, mais reste bien en-deçà de ce que le premier a pu offrir par le passé (les riffs de guitare de “Mad Max : Fury Road” ne sont jamais parvenus à quitter notre tête, on l’avoue). Pour le positif, voilà tout.
L’empire du fond vert
Place au pire. Et là-dedans, “Godzilla x Kong : Le nouvel empire” se place parmi les meilleurs. Si l’animation des titans est de très bonne facture – sauf un, dont on taira le nom pour éviter de spoiler -, le reste des effets visuels claudique. Rien ne semble palpable, notamment dans la Terre creuse, ce monde en-dessous du monde où King Kong s’est retiré après le déjà mauvais “Godzilla vs. Kong”, du même Adam Wingard, sorti en 2021.
Une des zones n’aurait pas dépareillé avec certains décors des derniers Marvel, pour lesquels des artistes d’effets spéciaux usés jusqu’à la moelle par la machine productiviste hollywoodienne enchaînent cafés et burn-out dans des délais inhumains. Résultat, et ce n’est pas de la faute des petites mains, c’est moche.
Godzilla, Kong, plus c’est gros…
Il y a aussi, dans ce film, un réel problème de mise en scène quant à la taille des monstres. Si, lorsqu’ils se battent sur Terre, elle est bien démesurée à côté des immeubles, certaines scènes, notamment quand ils sont entre eux, laissent penser que nous sommes face à des bestiaux hauts d’une dizaine de mètres. Ça heurte la cohérence globale. Pas mieux côté scénario, qui ne prend pas conscience de son inconscience et essaye de balancer des messages forts dans un ramassis d’absurdité. Forcément, le film échoue. Grotesque.
Passons sur le casting, parce que les humains sont réduits à leur plus simple trait (comprendre : faire de l’exposition quand les expressions faciales de Kong ne suffisent pas) et que nous ne souhaitons pas être désagréables envers Rebecca Hall, Dan Stevens ni Brian Tyree Henry. Passons également sur du fan service foireux, à base de prothèses mécaniques pour King Kong et de changement de couleur inexpliqué – mais quand même plutôt stylé – pour Godzilla. De ce film, il n’y a rien à sauver. Un flop titanesque.
Dorian Lacour