Glauque – L’édito de Christophe Bonnefoy
On baignait depuis quelques jours – des mois même, disons-le -, dans le malsain. Les accusations d’agression sexuelle sont devenues récurrentes dans le monde du spectacle, de la télévision ou de la politique. Mais comme on dit, ce n’est aucunement à un tribunal virtuel – celui qui voit notamment les réseaux sociaux se transformer en enceinte judiciaire sans aucune légitimité – de faire la loi. La Justice est là pour ça. La parole des victimes doit être entendue. Mille fois entendue. Mais celle de ceux qu’elles accusent également. Sans condamner avant d’avoir enquêté. Sans sanctionner avant d’avoir vérifié, pesé, écouté les un(e)s, comme les autres. On peut être, et à juste titre, écœuré par certains actes. On doit, à l’inverse, s’interdire de condamner sans preuve, même si visiblement, c’est dans l’air du temps.
Dans l’affaire dévoilée ce mardi et qui concerne le riche courtier en assurances Jacques Bouthier, l’une des principales fortunes de France, on passe du malsain au carrément glauque. A vomir. Ici, on ne parle pas d’approches pour le moins lourdingues ou de gestes qui auraient dépassé une pensée. Mais de « viols sur mineure » et de « traite des êtres humains ». Là également, la présomption d’innocence doit s’exercer. Evidemment. Mais si les faits et détails – et ils semblent nombreux et très précis – décrits ce mardi étaient avérés, ils dépassent l’entendement. On plongerait dans une sorte d’esclavage moderne et une forme de bestialité qui tiendraient carrément plus de la pathologie que du désir d’asseoir sa toute-puissance. On en est au “remplacement” d’une jeune femme de 22 ans par une autre de 14 pour assouvir ses envies. A l’asservissement par l’argent d’une adolescente par un sexagénaire pour mieux disposer d’elle à toute heure du jour ou de la nuit. Entre autres. Foutue époque.