Gilles Goiset, le hussard noir d’Aprey
Figure littéraire du Sud haut-marnais, Gille Goiset vient de publier son dernier roman, “Les hussards noirs de la République”, aux éditions Le Pythagore. L’ouvrage, qui suit le parcours de trois instituteurs d’Aprey, se veut un hommage aux maîtres d’écoles rurales de jadis.
Comme toujours avec Gilles Goiset, il y a le romancé et le vrai. Et il y a la fiction et l’Histoire. Enseignant retraité en histoire-géographie, et maire de la commune d’Aprey (à proximité d’Auberive) de 1995 à 2020, Gilles Goiset a publié de nombreux romans depuis une vingtaine d’années, (presque) tous basés sur l’Histoire du territoire en général, et parfois de son cher village en particulier.
Le dernier en date, qui vient d’être publié aux éditions Liralest/Le Pythagore, ne fait pas exception. Intitulé “Les hussards noirs de la République”, il se veut un hommage aux instituteurs des écoles rurales, tous dévoués corps et âmes à la réussite de leurs élèves et passionnés par leur mission à la fois pédagogique et civique. Pour ce faire, Gilles Goiset a pris trois exemples, réels. Trois instituteurs d’Aprey, naturellement, qui ont fait, chacun à leur manière, l’Histoire de l’école d’Aprey, disparue depuis une dizaine d’années. « Je suis parti de ces exemples, de certains faits réels, puis j’ai romancé et inventé les dialogues, des situations dans leurs classes, et vis-à-vis des familles du village », détaille l’écrivain haut-marnais.
Les affres de l’Histoire
Le premier de ces “hussards noirs” est Pierre Dassigny, instituteur d’Aprey de 1875 à 1891. Gilles Goiset, se basant sur les éléments qu’il a récoltés, en fait un pionnier de la loi Jules Ferry (1884) consacrant l’instruction publique laïque et obligatoire. « Au départ, il n’y était guère favorable. Puis il a très vite changé d’avis lorsqu’il a compris tout ce que cette loi impliquait », précise Gilles Goiset.
A son départ pour l’école de Hortes en 1891, Pierre Dassigny voit Henri André lui succéder. Ce dernier restera en poste jusqu’en 1919, et la guerre semblera traverser intégralement ses 28 ans de sacerdoce laïc. Gilles Goiset le décrit, en effet, comme un chantre de la volonté républicaine de “revanche” de l’époque, dans une France meurtrie par la perte de l’Alsace et de la Moselle. Mais, confronté aux réalités de la guerre, la vraie, de 1914 à 1918, Henri André n’aura plus qu’une seule angoisse : pourvu que ses anciens élèves, ses « chers petits » qu’il a vu grandir, reviennent vivants du front…
Sévère mais juste
Enfin, le troisième, Maurice Girardot, est évoqué avec nostalgie et tendresse par Gilles Goiset. Il occupe une place à part dans le roman : « C’était mon instituteur. Celui qui m’a donné la vocation de devenir enseignant, car j’ai décidé à ce moment-là que je le serais ». Lui aussi confronté aux affres de l’Histoire, Maurice Girardot, en poste de 1927 à 1959, devra abandonner son école pendant la Seconde guerre mondiale. Fait prisonnier, il restera en Allemagne durant cinq ans avant de revenir reprendre sa mission.
Sévère, mais égalitaire et juste, il n’hésite pas à s’opposer aux notables du village mécontents des punitions justifiées infligées à leurs enfants. « Il a toujours eu le soutien du maire », glisse Gilles Goiset, un sourire en coin — il s’agissait alors de son père : Pierre Goiset. Resté au village à sa retraite, il y meurt paisiblement en 1971. Un an auparavant, Gilles Goiset était à son tour devenu enseignant : « M. Girardot en était content et fier… ».
Nicolas Corté