Forum Histoire et Médias : le témoignage d’une journaliste au parcours singulier
Dans le cadre de la semaine de la presse à l’école, 230 collégiens et lycéens de l’académie de Reims ont assisté à la conférence de la journaliste et écrivain Guillemette de Sairigné ce jeudi 30 mars, dans l’amphithéâtre Anne-de-Gaulle du Mémorial de Colombey. Un témoignage à la fois instructif et émouvant.
Journaliste à l’Express, au Monde, au Point puis au Figaro Madame, où elle avait en charge la rubrique des “Grands Entretiens”, Guillemette de Sairigné a côtoyé de grandes personnalités, de Jacques Chirac à Gérard Depardieu, de l’abbé Pierre à Romain Gary. Mais ce dont elle est venue parler aux élèves, c’est surtout de son parcours personnel tout à fait singulier, qui a influencé toute sa carrière d’écrivain.
Car la journaliste fut d’abord la fille de Gabriel Brunet de Sairigné, Compagnon de la Libération au destin tragique, officier de la Légion étrangère mort pour la France en Indochine en 1948. Guillemette n’avait que 9 mois. Sa petite sœur n’était pas encore née.
Si la petite orpheline qu’elle était a fait la Une de Paris Match cette année-là, elle a ensuite cherché à en savoir plus sur ce père disparu prématurément, qu’elle appellera “Mon illustre inconnu” dans son livre, publié en 1998 et régulièrement réédité depuis (Prix de l’Académie française).
Fille d’un héros qu’elle n’a pas connu
Ainsi Guillemette de Sairigné a émaillé son témoignage de souvenirs personnels, où l’armée, toujours en toile de fond, avait une importance considérable. La Légion notamment, puisque son père devint, à l’âge de 33 ans, en 1946, le plus jeune chef de corps de l’armée française, en prenant le commandement de la 13e demi-brigade de Légion étrangère en Indochine française. Il le restera jusqu’à sa mort le 1er mars 1948, dans un convoi tombé dans une embuscade sur une route du Vietnam.
Admiré de son vivant pour son courage et ses faits d’arme par tous les légionnaires et par le général de Gaulle lui-même, le héros de Narvik et de Bir Hakeim est devenu une icône en disparaissant à l’âge de 35 ans, deux ans après son mariage.
L’urgence, pour Guillemette de Sairigné, a d’abord été de dépasser cette image iconique et de partir à la rencontre de son père. Elle a raconté aux élèves le périple entrepris avec sa sœur sur les routes de Saigon et tout le long travail d’enquête qui a suivi.
La journaliste, passionnée de littérature et d’histoire, a ensuite écrit d’autres biographies. “La Circassienne”, en 2011, raconte l’histoire d’une autre figure de la Légion, féminine cette fois : la comtesse de Luart, née Gali Hagondokoff, qui dirigea une formation chirurgicale mobile pendant la Seconde Guerre mondiale. Et “Pechkoff, le manchot magnifique”, qui est la première biographie du fils adoptif de Maxime Gorki.
Son dernier ouvrage, paru en juin 2022, est consacré au dernier Compagnon de la Libération, Hubert Germain, inhumé le 11 novembre 2021 au mémorial du Mont Valérien (“Le dernier des Compagnons, Hubert Germain”, éditions Thallandier).
Au jeu des question-réponses
A la suite de son témoignage, les élèves ont eu le loisir d’interroger la conférencière. A la question d’un collégien de Vitry-le-François : « Comment vous imagineriez-vous si vous aviez eu une vie normale ? », Guillemette de Sairigné a répondu : « Je ne sais pas. Je crois que je resterais toujours fascinée par l’heure du choix (…) Seule l’histoire peut dire quel était le chemin qu’il fallait emprunter ».
La biographe, qui a ressuscité dans ses livres de belles figures de l’armée regrette que celle-ci soit si peu connue aujourd’hui, malgré sa popularité : « Il y a une ignorance de la vie militaire, c’est dommage car nos grands chefs militaires sont vraiment exceptionnels. Même parmi les jeunes il y a des gens fantastiques : ils partent en Opex quatre mois d’affilée, pendant que leur femme tient le cap à la maison, avec la mort comme hypothèse. Cette flamme qu’ils portent en eux je ne la retrouve pas dans la société civile ».
Participants et organisateurs
Les établissements scolaires ayant participé à ce forum sont les suivants : collèges de Colombey et de Châteauvillain, lycée Bachelard de Bar-sur-Aube (Aube) et Charles-de-gaulle de Chaumont ; et en distanciel : collège des Indes de Vitry-le-François (Marne), lycée Jean-Moulin de Revin (Ardennes) et lycée Philippe-Lebon de Joinville.
Le forum était organisé et animé par les deux professeurs détachés du Mémorial Charles-de-Gaulle, Loïc Gigaud et Alexandre Niess, en présence de l’inspecteur pédagogique régional, Pascal Lalmy.