Former un chien au cavage
Président de l’Association trufficole de la Haute-Marne, Alain Adamec nous donne les clés pour éduquer un chien à chercher des truffes.
L’année 2020 n’est pas une grande année pour les truffes. « Depuis le 15 octobre, on n’en trouve plus. Il a fait trop sec. C’est la quatrième année que nous faisons ce constat. C’est catastrophique », commente Alain Adamec. Président de l’Association trufficole de Haute-Marne, ce dernier s’intéresse aux truffes depuis son plus jeune âge. « Mon grand-père vivait avenue des États-Unis, à Chaumont. Tout au bout, il y a un chemin. On entendait régulièrement des gens piocher. C’était intrigant ! Je lui ai demandé ce qu’ils faisaient et il m’a répondu que ces personnes cherchaient des truffes ! » Habité par ce souvenir, Alain Adamec s’est un beau jour lancé.
Il y a peu de truffes, mais il y a de la demande, surtout en cette période de fêtes. Pour les puristes qui ne veulent que de la truffe de Haute-Marne, il faudra miser sur des produits congeler. Mais pour se préparer à des jours meilleurs, il est possible de s’entraîner. Et à moins d’adopter la mouche ou d’avoir un cochon, l’idéal est tout de même d’avoir un chien. Alain Adamec a toujours eu des chiens truffiers. Il a un petit faible pour les Labradors. Mokka, âgée de quatre ans, est son amie de cavage. « La chienne que j’avais auparavant l’a formée. C’est le plus simple », indique-t-il. Mais pour ceux qui n’ont pas encore de chien truffier, il est possible d’éduquer le vôtre. « Il faut que le chien ait au moins deux ans. Les jeunes chiens peuvent prendre ça pour un jeu et ensuite décider de ne plus y aller. »
Le chien idéal
Pour ce connaisseur, la base est d’avoir une bonne relation entre le maître et son chien. « Je dirais que le chien doit être plutôt d’un tempérament dominé. Il doit bien écouter son maître », relève Alain Adamec. Quant aux races les plus adaptées, il est clair que certaines ont de nettes prédispositions à ses yeux, « comme le Labrador, le Border collie, les Bassets et même de « bons bâtards” ». En revanche, certains chiens n’ont a priori pas de grandes prédispositions pour l’art du cavage, à l’instar du Boxer ou du Bouledogue. Les chiens de chasse sont quant à eux trop facilement dissipés par les odeurs de gibier. Et les fameux Lagotto, réputés comme étant les meilleurs ? « Ils sont sans doute très bons, mais le commerce qui est fait autour de ces chiens ne me plaît pas trop », observe l’expert.
Mokka, sa chienne, « travaille beaucoup au vent. Elle fait des allers-retours puis elle marque en donnant un coup de patte et elle attend », poursuit Alain Adamec. Mokka attend les félicitations de son maître – qui déterre la truffe – et lui donne un petit morceau de fromage en récompense.
La base
« Quelqu’un qui voudrait former un chien doit l’entraîner en cachant de petits morceaux de fromage. D’abord dans la maison, sous des tapis. Puis à l’extérieur. Après, on se procure une truffe et on la fait sentir au chien. On regarde sa réaction. Puis on la cache et on l’accompagne pour la trouver. Il faut être patient. Cela peut demander du temps, mais cela peut aussi se faire en une après-midi ! »
Pour se perfectionner, il faut ensuite passer au niveau supérieur : aller en forêt. « Il faut se rendre dans un endroit propice. Il ne faut pas décourager le chien. Il n’y a pas des truffes partout. En observant bien, on peut identifier le biotope et mettre toutes les chances de son côté », recommande Alain Adamec. La présence d’épines noires ou de groseilliers sauvages sur un sol calcaire sont de bons indicateurs.
Et si le chien ne pratique pas régulièrement, va-t-il perdre ses aptitudes ? « Non, ils n’oublient pas ! Et en vieillissant, ils se perfectionnent. »
Rappelons en conclusion qu’une législation stricte encadre la « chasse aux truffes”. On ne peut pas aller n’importe où ni n’importe quand. En Haute-Marne par exemple, la période court du 15 septembre au 31 décembre.
Sylvie C. Staniszewski
s.chapron@jhm.fr