Feux de cheminée : brûleurs du temps des sapeurs-pompiers… et évitables
Plus d’un feu de cheminée par jour en Haute-Marne, en 2022, dont six dans le secteur de Langres. Interventions banales ? Surtout pas, expliquent le chef du centre de secours Benoît Kipper et le lieutenant Julien Rousset. Complexes, chronophages et risquées, au contraire. Alors que ces feux sont évitables.
« Depuis le début de l’année, en Haute-Marne, les sapeurs-pompiers sont intervenus sur vingt feux de cheminée ». Une cadence infernale qui n’a pas épargné le secteur d’intervention du centre de secours de Langres, ajoute son chef le capitaine Benoît Kipper. On en a en effet compté six sur leur territoire. Or, « si un feu de cheminée paraît banal », il peut facilement dégénérer. Ainsi, sur ces vingt petits feux dans le département en 2022, trois ont dégénéré, avec parfois la destruction totale de la maison. En outre, les interventions des secours s’avèrent complexes. Les sapeurs-pompiers « ignorent si le foyer va se propager », et ils prennent le temps de traquer les potentiels points chauds. Sachant que « l’urgence est moindre ». Toutefois, à entendre le lieutenant Julien Rousset décrire le travail des personnels langrois confrontés à ces petits feux, on comprend que, malgré des précautions ajustées, ils prennent des risques. Un scénario catastrophe auquel le capitaine Kipper préfère ne pas penser. « Ce serait particulièrement compliqué d’avoir un accident car ce sont des situations sans enjeu humain ».
« Comprendre le cheminement du conduit »
« En arrivant, on mesure la virulence du feu ». C’est la première appréciation des sapeurs-pompiers, avant de déplier leur feuille de route. Face à un feu de cheminée, ils sont à tout coup au minimum six personnels dépêchés avec un engin incendie. Le lieutenant Julien Rousset indique que « régulièrement », une échelle aérienne complète l’arsenal -à coulisse, grande échelle. Seau-pompe, lance à eau si besoin, voilà pour le matériel classique d’extinction, sauf que de multiples autres tâches attendent les secours. Un lot de sauvetage protège des chutes éventuelles : il faut accéder à la toiture harnachés, longés, équipés d’un appareil respiratoire et y progresser. Cet objectif n’est poursuivi qu’après reconnaissance du conduit. « Par où passe-t-il ? Y a-t-il des coudes ? Des planchers, des poutres à proximité ? Il faut comprendre son cheminement pour couper le tirage et procéder à l’extinction du foyer ». Embarqués aussi, les détecteurs de monoxyde d’azote et les caméras thermiques, qui localisent les points chauds invisibles.
Un feu qui couve à bas bruit
« Il n’y a pas de crépitement, ça se consume à bas bruit… ». On a vu les flammes s’éteindre dans l’âtre, on est maintenant au lit à dormir, c’est le contexte classique de développement du feu de cheminée. « D’où l’intérêt des détecteurs de fumée… ». Voilà un moyen simplissime, peu coûteux qui démontre, le capitaine Kipper insiste, qu’ « un feu de cheminée est évitable ». Il y a d’autres… pare-feu, qui tiennent à notre vigilance. « Quand on constate une baisse du tirage de sa cheminée, mieux vaut s’inquiéter de savoir s’il lui faut un ramonage que de recharger le feu qui s’essouffle en bois. Ou, parfois, de pointer la présence d’un obstacle – comme un nid ». L’entretien de sa cheminée est bel et bien capital pour prévenir tout départ de feu, ainsi que le choix du bois qu’on brûle (voir encadré). Le brouillard qui enveloppe souvent notre territoire « perturbe le tirage, en ne facilitant pas l’évacuation de la fumée, ni donc de la température ». En tout état de cause, c’est… avant la période à laquelle on rallume des feux dans sa cheminée qu’il convient de vérifier la qualité de la combustion, du tirage.
Fabienne Ausserre
f.ausserre@jhm.fr
« Un ramonage sérieux, c’est 20 € par mois »
« On vend un travail, pas un papier pour l’assurance ». Chez Dominique Drut à Chalindrey, 40 ans d’expérience au compteur, on précise sa pensée. « 20 minutes pour un ramonage, ça ne suffit pas ». Le hérisson doit passer… et repasser… jusque dans la cheminée, qui peut être bouchée à son sommet.
Il y a déjà un intérêt financier à l’entretenir car un professionnel consacre le temps qu’il faut à un nettoyage en profondeur qui éradique tout… foyer à risque. Faute d’entretien, l’intervention dure, la facture s’allonge. « Il varie d’1h30 à 4h, voire 5h ».
L’autre intérêt que le ramoneur préserve est primordial : la sécurité de l’occupant, de l’habitation. Ce dernier y trouvera son compte. « Le ramonage sérieux d’une cheminée lambda, c’est un investissement de 20 € par mois ». Si l’hiver se fait discret, il reste émaillé de pointes de fraîcheur qui invitent à faire une flambée. « Cette année, le temps a été doux donc les gens ont fait simplement de petits feux. Mais ils salissent, en déposant du bistre ». Or, non seulement voilà matière hautement inflammable, mais qui « gonfle jusqu’à dix fois son volume ».
Pour prévenir un danger qui couve, « il faut faire brûler des bûches de ramonage, qui liquéfient les goudrons ». Au rythme « impératif » d’une fois par mois. La qualité du bois brûlé pèse également dans le degré de tapissage en bistre.
Au passage, ce petit entretien régulier vaut pour « les poêles à granulés, de plus en plus prisés quand on avance en âge, les chauffages au fuel, à gaz également ».
Le pic de la saison du ramonage court de mi-août à fin février, même s’il y a une avant-saison de deux mois : juin et juillet. Autant dire qu’actuellement, le ramoneur de Chalindrey répond aux sollicitations… « à 3 ou 4 mois ».