Et si le reliquaire de l’orgue de chœur n’était pas le bon ?
PATRIMOINE. Alors que la semaine d’inauguration de l’orgue de chœur s’est achevée ce dimanche 23 octobre, voilà que le reliquaire qui y a été installé ne serait pas le bon ! S’il s’agit bien de la châsse de saint Marcien, ce n’est peut-être pas elle qui se trouvait dans l’orgue à l’origine.
« Tout de suite, quand j’ai vu ça, je me suis dit que ce n’était pas possible. » En admirant l’orgue restauré dans le chœur de l’église Notre-Dame, Rodolphe Fior, paroissien passionné de patrimoine, a immédiatement été frappé par le reliquaire de saint Marcien, installé dans le buffet de l’orgue. « Si la niche a bien été conçue pour accueillir un reliquaire, ce n’est pas celui-ci ! », affirme-t-il. « L’orgue date de 1848 et pour moi, les croyants de l’époque n’auraient jamais installé des reliques dans un objet tronqué. » Car, oui, le reliquaire de saint Marcien n’est pas complet.
« L’orgue date de 1848 et pour moi, les croyants de l’époque n’auraient jamais installé des reliques dans un objet tronqué. »
Et Rodolphe Fior sait de quoi il parle, c’est lui qui l’a redécouvert et restauré il y a quelques années. « J’aime bien fouiller dans tous les coins, dans les lieux qui ne sont pas ouverts au public. C’est comme ça qu’un jour, dans le grenier du presbytère, au milieu d’un fatras bon à mettre à la poubelle, j’ai trouvé ça. » En le voyant installé sous l’orgue de chœur de l’église Notre-Dame, il a donc tout de suite remarqué qu’il manquait le toit et la flèche du reliquaire.
« L’orgue a été fait pour un autre reliquaire. Mais lequel ? »
Or, c’est justement cette flèche qui symbolise l’élévation vers Dieu. « Là, il ne reste que la partie horizontale, celle qui représente l’Humain. Il manque la partie verticale, qui marque le divin. » L’ensemble mesurant 1,90 m de haut, il est en effet impossible de le rentrer en entier sous l’orgue. Pour Rodolphe Fior, « l’orgue a été fait pour un autre reliquaire, sans doute disparu aujourd’hui. Mais lequel ? » Impossible à dire.
Toujours est-il que Rodolphe Fior s’est penché sur l’histoire de ce reliquaire. « Les reliques de saint Marcien ont été ramenées de Rome par Louis de Baudicour, de Marnaval, dans un coffre, en 1845. Pour les accueillir, Edmond Dubois, un sculpteur local, a réalisé cette châsse en chêne, pour s’harmoniser avec les stalles du chœur, dont il est également l’auteur. »
Derrière le maître-autel
Après une grande procession dans toute la ville, le 16 novembre 1845, comme le montre le vitrail de saint Marcien, le reliquaire est installé derrière le maître-autel, alors plus avancé qu’il ne l’est aujourd’hui. « Il reposait sur une maçonnerie et un système de poulies permettait de le soulever, à l’octave de la Toussaint (les huit jours suivant le 1er novembre, Ndlr), pour le sortir en procession. »
Selon les recherches effectuées par Rodolphe Fior, le reliquaire est ensuite installé dans la chapelle redécouverte en 1862 à l’occasion des travaux de la voûte, à droite en entrant dans l’église. Il y restera durant un siècle. Car en 1962, la “Mise au tombeau” est redécouverte. « Depuis 1940, la dévotion pour les reliques de saint Marcien a presque disparu. En 1964, on enlève donc le reliquaire pour le remplacer par la “Mise au tombeau”. » Dès lors, on perd la trace de cette châsse, jusqu’à ce Rodolphe Fior ne la redécouvre et la restaure.
Bien que persuadé que l’orgue de chœur n’a pas été réalisé pour ce reliquaire, Rodolphe Fior se réjouit tout de même de la « belle remise en valeur de cet élément de patrimoine ». Dimanche 30 octobre, à l’occasion de la messe, l’évêque de Langres bénira l’instrument rénové. L’occasion pour les fidèles de (re)découvrir le reliquaire de saint Marcien. Et son histoire mouvementée.
P.-J. P.