Enora Services : « Juste sauver les meubles »
Jocelyne Gabriel et Francisco De Sa répondent aux rumeurs de fermeture de leur entreprise de transports, Enora, basée à Chaumont. Elle dénonce une volonté de déstabilisation tout en constatant que ce secteur économique se précarise. L’entreprise est en phase de restructuration.
Le secteur du transport routier va très mal depuis plusieurs années et la hausse du prix de l’énergie et donc des carburants est en train de l’achever. Les entreprises de transport sont extrêmement fragilisées et là est sans doute la première raison de la rumeur qui dit qu’Enora Services (anciennement LPC Transports) va fermer.
La société est spécialisée dans le domaine du transport routier de tous types de marchandises telles que les marchandises agroalimentaires, marchandises industrielles. Une autre, en parallèle, propose également des services de transport express (messagerie) et de services logistiques. Celle-ci se porte bien.
Jocelyne Gabriel, directrice associée et Francisco De Sa, gérant associé, parle, en fait, de restructuration « comme pour de nombreuses entreprises de ce type au niveau national » et non pas de liquidation comme entendu. Ils le font à la demande et avec le soutien du client DPD et ils souhaitent ainsi « sauvegarder ce qui est possible ». Cette restructuration qui sera réalisée durant l’année 2023 aura pour conséquence de réduire le nombre de chauffeurs.
Cette rumeur de fermeture s’explique aussi, selon Jocelyne Gabriel, par le départ de sept salariés qui s’occupait de GLS pour lequel Enora n’est plus prestataire. Cette rupture entretient des malentendus.
« Couper les branches pourries » à Enora Services
Enfin, la rumeur vient sans doute de la décision d’arrêter de travailler avec deux clients de 30 ans qui n’apportaient plus aucune rentabilité. Jocelyne Gabriel veut ainsi « sauver les meubles et les salariés qui restent. Je fais le travail d’un chef d’entreprise en préservant la base et en maintenant encore des emplois. Parce que toutes les entreprises doivent gagner de l’argent, nous voulons être payés à notre juste valeur par nos clients et coupons toutes les branches pourries ». Les deux dirigeants expliquent que la restructuration d’Enora n’est pas terminée dans le but d’aller vers des bases saines.
Pour expliquer cette situation fragilisée, Francisco De Sa donne quelques chiffres parlants. Au-delà des assurances ou de l’entretien des camions dont le coût augmente, fin 2021, pour remplir la cuve de 15 000 litres de carburant, il fallait payer 17 000 €. Ensuite, tout est allé crescendo et désormais le plein coûte 34 000 € alors que la cuve doit être remplie toutes les deux semaines. Le tout alors que les dirigeants ne peuvent pas répercuter cette hausse sur leurs tarifs. Jocelyne Gabriel fait une analogie avec les producteurs de lait qui se retrouvent dans une situation similaire.
A cette hausse des charges s’ajoute, selon Jocelyne Gabriel, un traitement inégal entre les entreprises de transports. La sienne n’a pas droit au remboursement partiel de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques. Elle n’a pas eu recours, non plus, au prêt garanti d’Etat durant la crise sanitaire mais elle déplore surtout l’absence d’écoute et de soutien des chefs d’entreprises. Elle précise : « l’Etat a peur, tous les trimestres, des chiffres de l’emploi mais ne prend pas en compte ceux qui les créent ».
Elle constate que le secteur « s’ubérise et se précarise » du fait d’une concurrence forte d’entreprises éphémères qui cassent les prix. Elle parle d’une concurrence déloyale et demande la mise en place de prix planchers pour éviter les faillites. En attendant, elle a créé la société Exan Solutions « pour protéger les clients fidèles. Nous serons toujours là quel que soit l’entité avec, pourquoi pas, d’autres activités en parallèle ».
Frédéric Thévenin