Ehpad de Manois : la vie est ici
L’Ehpad la Côte des Charmes de Manois vient de fêter son tout premier anniversaire. Les résidents et leur famille rencontrés à cette occasion ont spontanément évoqué leur ressenti. Les professionnels témoignent de leur engagement.
La lumière de printemps, encore fraiche dans ses teintes, revigorante, inonde le hall de l’établissement. Confortablement installés face aux vastes ouvertures, les hôtes de l’Ehpad devisent tranquillement. Partout autour, la nature se réveille : les tâches de couleur tranchent sur le vert tendre de l’herbe qui ceinture les bâtiments. La vie est ici et le fait savoir.
L’Ehpad la Côte des Charmes est de première jeunesse : il a ouvert il y a un an. La vaste résidence de plus de 4000m² est conçue pour accueillir 68 résidents répartis en trois unités. La première et la plus grande est l’Ehpad dit classique, on y retrouve principalement des personnes ayant une dépendance physique. Ne généralisons pas : des personnes âgées autonomes font aussi le choix d’y vivre afin de retrouver une vie sociale et des amis ou pour être entourées et accompagnées au quotidien.
L’unité de vie protégée (UVP) est spécialisée dans l’accueil de personnes âgées atteintes de la maladie d’Alzheimer ou de troubles apparentés. Tout y est prévu dans ce dessein : des chambres individuelles, des espaces collectifs de détente, une salle à manger et un système de sécurité adapté. Les résidents peuvent y participer à des animations spécifiques comme des ateliers de stimulation cognitives et sensorielles. Ces activités leurs permettent de garder une vie sociale avec les autres personnes de la résidence. Les activités de stimulation aident à réduire les troubles et ralentir la dépendance. Chacun y est suivi personnellement afin d’évaluer constamment ses besoins pour y répondre.
Enfin, l’Ehpad de Manois a pour particularité d’avoir en ses murs une unité dédiée aux personnes handicapées vieillissantes (PHV). Cette section répond aux besoins de prise en charge médicalisée pour les personnes présentant un handicap mental. Elle accueille principalement des travailleurs ou anciens travailleurs d’ESAT confrontés au vieillissement précoce. Ces personnes sont accompagnées quotidiennement par une animatrice et deux éducateurs spécialisés qui œuvrent à leur maintien des acquis et de l’autonomie. Voilà planté le décor.
Chiens, chats, poules, moutons, lapin et même cheval
Depuis son ouverture en avril 2021, l’établissement a fondé son action sur deux points forts. Le premier est tout entier dans la formule mon Ehpad, mon domicile. Il s’agit de lisser autant que faire se peut les différences entre l’ancien et le nouveau domicile, ici. Cela se traduit formellement dans les aménagements : le choix des meubles, de la décoration. Plus subtil : cela s’invite résolument au sein de la relation professionnel-résident. Un exemple : il s’agit de bannir au maximum toutes les actions « à la chaine » pour le professionnel. Ainsi les fiches de poste sont-elles allégées afin que les soignants et non soignants aient du temps pour discuter avec les personnes âgées. L’échange, ici, n’est pas un vain mot. La notion de partage serait presque érigée en règle, sauf qu’ici, elle relève davantage du reflexe. Partager un café avec un résident est juste normal.
Le second pilier est la médiation animale. La présence des animaux est apaisante, distrayante et source d’émotions. Les résidents de l’Ehpad de Manois aiment le contact avec l’animal ; il est un point d’ancrage. Les gestes de la vie quotidienne reviennent : caresser, brosser, nourrir et plus globalement prendre soin. Ces gestes permettent de conserver des repères ; ils sont essentiels dans le maintien du lien avec la réalité. Pour les résidents, le contact animalier permet de travailler la motricité sans même s’en rendre compte. L’animal sollicite également la mémoire, le sens de l’observation, il renforce le sentiment d’identité et incite à aller vers l’autre, à engager le dialogue et à s’intégrer au groupe. C’est un véritable partenaire de soin. Dans les unités protégées, le contact avec l’animal permet de réduire les angoisses. Il a un effet apaisant. L’estime de soi augmente en présence de l’animal. L’animal apporte un véritable bien-être émotionnel et participe à l’adaptation à la résidence médicalisée, à l’expression personnelle et à la stimulation des fonctions cognitives et sensorielles. D’où la présence au sein de l’EHPAD des poules, des chiens, des chats, des moutons, un lapin et occasionnellement… un cheval !
Restauration et animation participent à un bon équilibre
Les plats servis aux résidents sont cuisinés sur place. Plus de 70 % des produits sont locaux. Le seuil des 30 % de bio a été franchi. L’alimentation est conçue ici comme un vecteur primordial de bien-être et de santé. L’équipe de cuisine est au petit soin et à l’écoute des résidents.
L’animation, les échanges et les liens sociaux avec l’extérieur sont érigés en principes de base pour favoriser la qualité de vie en établissement. Des animations sont proposées tous les jours. Régulièrement interviennent des prestataires extérieurs. Chaque semaine, l’Association Siel Bleu met en place et anime une séance de gymnastique douce. On considère ici qu’une activité physique adaptée régulière participe de la prévention santé en contribuant à l’amélioration du bien-être et de la qualité de vie des personnes.
Julia Gauthier : « Son plus bel anniversaire »
Julia Gauthier est psychologue : « Il faut avoir une vocation, pour travailler avec des personnes âgées ; c’est un public sensible. Il y a plein de deuils à faire comme la motricité, la perte de l’autonomie, de l’incontinence, du deuil familial. Cela requiert beaucoup de soutiens, d’écoute, de bienveillance. L’arrivé ici peut être compliquée : on passe souvent d’une vie solitaire à une vie collective. Ici, c’est le psychologue qui va à la rencontre du résident. Ce métier me plait. Les résidents sont tellement enrichissants, ils sont la sagesse. Ils ont des conseils sur la vie.
Je n’ai pas d’emploi du temps type, je m’adapte aux besoins du jour. Le travail se fait aussi avec les familles. Mon plus beau souvenir est peut-être l’anniversaire d’une dame ; nous lui avions organisé un évènement particulier. Sa réaction nous a tous émus ; elle nous disait qu’à 96 ans c’était son plus bel anniversaire. Cela m’avait énormément touchée. Je ne l’oublierai pas ».
Alexandra Zich : « un accompagnement en douceur »
J’ai découvert l’Ehpad de Manois lors de mon stage de fin d’études. J’ai eu un coup de cœur. C’est une résidence très familiale, très proche et unie. C’est un lieu de vie. Même si c’est la dernière maison, l’idée est que cela soit un lieu où on vient par envie, par choix.
A la fin de mon stage, le directeur m’a proposé d’installer mon cabinet dans l’Ehpad. Bien que l’image puisse être aux premiers abords déroutante, finalement c’est un succès. J’ai principalement de la patientèle jeune, des enfants. Des liens se créaient entre les enfants et les résidents. Dans le cadre de mon métier je garde un lien avec les résidents pour la conservation d’un maximum d’autonomie, l’aide sur les activités de la vie quotidienne (soin, déambulation et alimentation), je fais de la préconisation pour des techniques dans les déplacements ou le matériel. J’apporte des conseils en gestes postures pour les soins des les résidents. La communication avec les équipes est fluide. Mon souvenir le plus marquant fut l’accompagnement fin de vie d’un résident. C’était un soir de décembre. Nous étions tous là, ensemble, pour décorer l’Ehpad aux couleurs de Noël. Il n’était pas seul, toute l’équipe était présente. Nous l’avons accompagné en douceur ».
Andrée Jupont : Mademoiselle sans les ailes
Cela fait un an que je suis salariée de l’Etablissement, j’ai donc fait son ouverture. Mes missions sont la supervision des ASL, du service et de la lingerie. Je suis une encadrante de terrain, je suis proche de mes équipes. Cela me permet d’être réactive et de corriger rapidement ce qui doit l’être. Ici, il n’y a pas de journée type ; c’est ce qui fait tout l’attrait de mon poste. Je peux parfois courir toute la journée et parfois c’est l’inverse, calme où je peux me consacrer au suivi de la qualité. J’ai aujourd’hui de vraies responsabilités, que je vis comme des défis, avec une équipe à gérer, une flexibilité dans mes journées et une forte autonomie. Mon plus beau souvenir restera celui d’une résidente avec laquelle nous avions des éclats de rire : à chaque fois qu’elle m’interpellait, elle m’appelait « Mademoiselle sans les ailes » à la place de madame. Ce n’était qu’avec moi. C’était notre complicité ».
Isabelle Beau : offrir un temps de bien-être
Isabelle Beau est éducatrice spécialisée : « Il y a douze résidents au sein de l’unité pour les Personnes Handicapées Vieillissantes. Nous sommes dans la relation d’accompagnement, il y a du temps d’observation, du travail en équipe ; nous devons monter le Projet d’accompagnement personnalisé. Les objectifs définis en équipe le sont sur des observations partagées. Dans cette relation éducative, nous cherchons chercher à maintenir l’autonomie de la personne et que aussi que celle-ci soit active dans ce projet. Je travaille aussi auprès des résidents sur l’estime de de soi, la socialisation et la gestion des conflits entre résidents.
Mon dernier souvenir marquant fut lors d’une sortie piscine, avec quelques résidents. J’avais beaucoup d’appréhension car les personnes de l’unité PHV peuvent parfois avoir des réactions inattendues en présence d’autres personnes qu’elles ne connaissent pas. En fait, ce fut tout l’inverse : un des résidents fut même extrêmement heureux de retrouver les bassins pour nager. Ce fut génial de pouvoir lui permettre de poursuivre sa passion, d’offrir un temps de bien-être, de répondre à sa demande ».
Géraldine Lorin : « ORIN – Animatrice
Géraldine Lorin est animatrice : « C’est un métier de bien-être, où les résidents nous apprennent beaucoup concernant leur vie, il y a beaucoup d’échanges, de bienveillance, on s’adapte à la personne car chaque histoire est individuelle. Par exemple nous avons une résidente alitée pour laquelle nous avons organisé des activités personnalisées : accordéoniste, gym douce ou médiation animale. Personne n’est exclu. J’étais auparavant aide médico-psychologique dans un autre Ehpad mais j’avais besoin de prendre mon temps avec le résident. Je sens qu’ici je fais la différence dans le quotidien des résidents ».
Elodie Guyot : un esprit familial
Elodie Guyot est infirmière coordinatrice : « J’étais initialement infirmière car je voulais être proche des gens, les aider. Au cours de ma carrière j’ai travaillé dans d’autres secteurs et si finalement je suis aujourd’hui ici c’est parce que ce secteur offre une proximité avec les résidents que nous ne pouvons pas retrouver ailleurs. Nous apprenons à les connaitre, leurs souhaits, leurs habitudes ou leurs envies. Il se dégage de cette maison de retraite un esprit familial. Je suis devenue infirmière coordinatrice pour être au quotidien dans l’accompagnement des équipes, avoir une vision globale des soins. J’ai un coté perfectionniste qui se traduit dans mon management, je cherche au quotidien la bienveillance et la compétence. Je commence chacune de mes journées en faisant un tour dans toutes les unités pour être informée des éventuels soucis, pour les anticiper ou les résoudre. Puis il y a le temps de lecture des transmissions afin de faire un état des lieux de l’état de santé des résidents. Ensuite nous avons du travail essentiellement administratif de gestion ».
La très jeune doyenne, Madame Vigeannel
Madame Vigeannel affiche 96 au compteur de sa vie, ce qui fait d’elle la deuxième doyenne de la Côte des Charmes. Elle fut aussi la seconde résidente de l’établissement, le 14 avril 2021. Elle s’en souvient fort bien. Comme elle se souvient de tout, d’ailleurs, depuis son enfance à Suzannecourt et sa vie à Saint-Blin en passant par Joinville où elle fut postière.
Elle se souvient avec précision des premiers exemplaires de la Haute-Marne Libérée, sur une feuille recto-verso. Aujourd’hui, l’esprit alerte, le regard vif, même si elle aurait bien aimé rester vivre chez elle à Humberville, elle salue les qualités de l’ensemble du personnel qui l’entoure. Elle insiste : « nous sommes bien considérés ». Et elle confie : « les repas sont excellents ».
On vous révèle un secret : Madame Vigeannel est une vraie citoyenne. Elle est allée voter à l’élection présidentielle et elle mettra son bulletin dans l’urne pour les législatives.
Une association, ça change tout
La partie seniors du groupe SOS représente en France 3500 salariés ! Le groupe SOS gère 112 établissements et services dont 72 Ehpad dont ceux de Manois et Nogent qui partagent leur directeur : Josselin Laumont.
« Nous n’avons rien à cacher, nous » insiste à dessein Christian Kratz, le directeur général adjoint, présent à Manois pour l’anniversaire de l’établissement ; il rappelle que SOS est une structure associative qui réinvestit l’absolue totalité de ses excédents lorsqu’il y en a.