Six mois de sursis pour l’Ehpad de Maranville
Social. Le président du Conseil départemental ne se résout pas à voir les portes de l’Ehpad Marie Pocard de Maranville se fermer. Il a fait stopper ce jeudi 25 août les transferts programmés des résidents vers d’autres établissements du secteur. Il ouvre une période de six mois pour examiner les éventuelles conditions d’un maintien.
Coup de théâtre dans la fermeture annoncée de l’Ehpad de Maranville. L’annonce de cette fermeture à l’automne avait été faite aux familles et aux personnels ; le transfert des résidents vers les Ehpad de Châteauvillain, Arc-en-Barrois ou Riaucourt étaient programmés… Jusqu’à ce mercredi 24 août. Jusqu’à ce que Nicolas Lacroix, président du conseil départemental, convoque une réunion et mette tout le monde autour de la table : l’association Marie-Pocard, sa présidente Danielle Bertrand, Florent Etienne, directeur par intérim de l’Ehpad mais aussi le maire de Maranville, Aurélien Joly.
Nicolas Lacroix, qui s’était exprimé sur le sujet le 10 août, a contacté la directrice générale de l’ARS (agence régionale de santé). Il a demandé à ce que le transfert des résidents, qui a débuté le 11 août, soit stoppé. Ce qui a été accepté. Tant et si bien que les « déplacements » de résidents prévus ce jeudi 25 août ont été annulés. Selon nos informations, sur les 20 pensionnaires de l’Ehpad Marie-Pocard (sur 24 places), dix ont déjà été accueillis dans d’autres structures.
« J’aurais bien aimé que cette réunion se tienne avant », concède Nicolas Lacroix, conscient de l’interruption d’un processus de fermeture qui était déjà bien engagé. Mais il ne pouvait s’y résoudre comme il le laissait déjà entendre le 10 août déplorant la décision prise, « sans que personne ne soit venu me voir. »
Six mois pour trouver des solutions
Nicolas Lacroix fait partie de ceux qui pensent que tout n’a pas été mis en œuvre pour tenter de sauver l’Ehpad de Maranville qui fait face à des problèmes de ressources humaines mais aussi de normes, notamment en matière d’accessibilité. D’où sa requête : décréter un moratoire de six mois, période mise à profit pour étudier les solutions envisageables pour éviter de fermer ce petit établissement décrit comme une structure à taille humaine et à l’ambiance familiale.
Alors que je me bats « pour conserver tous les petits collèges de Haute-Marne », prolonge Nicolas Lacroix, « je ne suis pas là pour fermer les petits Ehpad non plus », ajoute-t-il. « C’est tellement compliqué d’obtenir des ouvertures de places, comment accepter qu’on en ferme ? », prolonge Nicolas Lacroix qui veut qu’un travail de fond s’engage, « aller au plus loin de ce que l’on peut faire », dit-il.
« Il a plus de moyens et d’envergure que moi »
Les quinze prochains jours vont être mis à profit pour trouver un fonctionnement qui puisse permettre à l’Ehpad de Maranville de traverser les six prochains mois. Six mois synonymes de sursis mais aussi d’espoir pour l’établissement, ses résidents et son personnel.
Même si l’échec peut être au bout du chemin. « Je fais confiance à M. Lacroix », confiait ce jeudi Danielle Bertrand, présidente de l’association, « il a plus de moyens et d’envergure que moi », a-t-elle ajouté, en espérant que l’issue soit heureuse.
Céline Clément
« Une lueur d’espoir » pour les personnels
Elodie Dantal, infirmière à l’Ehpad de Maranville et représentante du personnel ainsi qu’Anna Morel, secrétaire du syndicat départemental de l’action sociale 52 (FO) accueillent favorablement l’annonce du président du conseil départemental. Elles attendent la suspension de la procédure de licenciement pour les personnels.
Le 9 août dernier, les personnels de l’Ehpad ainsi que des proches de résidents se rassemblaient devant l’établissement pour dire leur incompréhension suite à l’annonce brutale de la fermeture. « Depuis, les salariées de l’établissement ont reçu énormément de soutien de la population. Une incompréhension et une aberration ont été exprimées à plusieurs reprises », disent dans un communiqué conjoint, Elodie Dantal, infirmière à l’Ehpad de Maranville et représentante du personnel ainsi qu’Anna Morel, secrétaire du syndicat départemental de l’action sociale 52 (FO).
Elles étaient rassemblées ce jeudi 25 août à l’union départementale Force Ouvrière. Toutes deux accueillent favorablement la décision -qu’elles ont appris mercredi- de Nicolas Lacroix de demander la suspension des transferts des résidents. « C’est une petite victoire pour les personnels, les résidents et les familles », commentent Elodie Dantal et Anna Morel. Elles confirment que le bureau de Nicolas Lacroix est bien resté ouvert « comme il l’avait annoncé. » Elles sont sur la même longueur d’onde que lui sur le fait que « tout n’a pas été tenté » pour sauver le petit Ehpad de Maranville.
Alors que l’arrêt des transferts des résidents est effectif, Elodie Dantal et Anne Morel attendent « l’annonce de la suspension de la procédure de licenciement » qui touche les personnels, 15 salariés au total (11 en CDI et 4 en CDD). Une procédure de licenciement collectif pour raisons économiques est en effet engagée. Elodie Dantal espère la convocation très prochaine d’un CSE (comité social et économique) afin d’officialiser l’arrêt de la procédure. « Satisfaites » de voir les choses « bouger », toutes deux espèrent que « tout le monde s’implique » dans la période des six mois qui s’ouvre.
« C’est éprouvant »
Demandant à rester anonyme, par souci de discrétion et sans vouloir jeter de l’huile sur le feu dans un dossier éminemment humain, une famille de résident a accepté de s‘exprimer.
Le parent de la dame fait partie des résidents qui ont déjà été transférés dans un autre Ehpad. « Les personnes très âgées ont leurs habitudes. Elles n’aiment pas qu’on les bouge. Un déplacement comme celui-ci est éprouvant pour les résidents et les familles », confie la dame qui a été prévenue « il y a une quinzaine de jours » du déplacement de son parent. Ce qu’elle déplore, sans animosité, c’est l’enchainement des événements, de l’annonce aux familles de la fermeture fin juillet aux transferts des résidents qui ont débuté le 11 août. Tout est allé très vite, trop vite. « Quand on nous a dit que l’Ehpad fermait ses portes, nous sommes tombés des nues », dit-elle. « A Maranville, c’est une petite structure familiale où on connaissait les résidents, les familles, les personnels (…) Nous, nous étions contents de Maranville », ajoute cette dame qui, comme d’autres familles, a subi cette décision d’un transfert « alors que nous n’avions rien demandé. » Souhaite-t-elle le retour à Maranville de son parent si cela était possible ? Elle avoue avoir besoin « d’y réfléchir. » Mais, même si son parent n’est plus forcément en capacité de réagir, en toute cas en apparence, la dame en est certaine : « c’est sûr que les résidents sont affectés par tout ce qui se passe. »
ARS : travailler à l’installation d’une administration provisoire
L’agence régionale de santé est partie prenante dans ce dossier pour toutes les questions liées la prise en charge des résidents. Comme l’indiquait aussi Nicolas Lacroix, une administration provisoire doit se mettre en place. C’est le travail qui est engagé pour les 15 jours qui viennent. « Nous sommes responsables de toute la partie soins », précise Cédric Cablan, le délégué de l’ARS en Haute-Marne. Son rôle va donc être de vérifier si la sécurité, la qualité de la prise en charge des résidents et la qualité des soins seront garantis dans la nouvelle organisation qui se profile et qui sera à la manœuvre dans les six mois à venir. L’ARS participera à la réflexion sur l’avenir de l’Ehpad. « Quelle formule retenir ? Chiffrer les investissements à réaliser et quelle répercussion sur le prix de journée », cite Cédric Cablan, sont une partie des questions auxquelles il faudra trouver des réponses.