Eco-Hebdo : un retournement inquiétant
L’économie n’est pas une science exacte, surtout quand elle s’adosse à l’art de la prévision. La Chine nous en fournit un exemple éclatant. Il y a quelques mois encore, elle était donnée gagnante dans sa course avec les États-Unis. Une affaire d’une ou deux décennies, disait-on. Et patatras, voilà que de lourds nuages s’accumulent au-dessus de l’Empire du Milieu.
L’agence de notation Moody’s a fait passer la « perspective » de la note de la Chine de « stable à négative ». En termes plus clairs, le pays risque d’entrer dans une ère de grandes difficultés. La crise immobilière, souvent évoquée, en représente l’aspect le plus visible. Mais il y a plus grave – et moins spectaculaire – c’est la chute des investissements étrangers : une baisse de 73% en un an. S’ajoutent une consommation intérieure à la peine et la baisse des prix, premier symptôme de la déflation. Moody’s ne fait que prendre acte de cette dégradation globale.
Cela veut dire tout simplement que l’économie mondiale émet des doutes quant à la capacité de Pékin à reprendre le rythme échevelé de son développement. La politique de réindustrialisation et de relocalisation menée par les grandes puissances occidentales n’est pas étrangère à l’essoufflement chinois. D’où cet effet de vases communicants : la Chine souffre et les États-Unis relèvent la tête.
La peur d’une Chine triomphante s’éloigne donc. Mais il serait imprudent de s’en réjouir. Son régime politique lui permet de passer en force là où les démocraties s’inquiéteraient par exemple d’un pouvoir d’achat en berne. Elle pourrait même être tentée par une aventure militaire à Taïwan pour faire diversion.
Patrice Chabanet