Eco-Hebdo : tout et son contraire
L’immobilier va mal. En l’espace de quelques mois, les ventes ont dégringolé, -22% selon la Fnaim. Différents marqueurs le confirment, comme la contraction du nombre d’ouvertures de chantiers, ou la fermeture de nombreuses agences immobilières. Ce retournement des affaires ne doit rien au hasard. Il est tributaire de l’évolution des taux de prêts immobiliers qui sont passés d’un peu plus de 1% à 4% en moins de trois ans. Concrètement, de potentiels acquéreurs ont vu se fermer les portes d’un crédit compatible avec leur niveau de revenus.
La crise immobilière illustre bien la complexité d’une gestion efficace des taux d’intérêt. Elle est confrontée à des contradictions impossibles. Leur augmentation est la conséquence directe des mouvements des taux directeurs, en clair des stratégies des banques centrales. Or leur obsession est de combattre l’inflation pour éviter les embardées de 1929. Pour y parvenir : attirer les consommateurs vers une épargne plus rémunératrice.
Ce faisant, le gouvernement doit gérer tout et son contraire. L’augmentation des taux est là pour éviter tout embrasement inflationniste, mais dans le même temps elle devient un obstacle pour ceux qui veulent investir dans la pierre. D’où des débats homériques entre les défenseurs de l’épargne et les partisans d’une politique de relance. Avec une question dont les réponses ne sont jamais satisfaisantes : quel est le bon taux ? Forcément, ce sera une cote mal taillée. L’épargnant jugera toujours que son effort est mal rémunéré, souvent en dessous du taux d’inflation. Pour sa part – et c’est souvent le même – l’acquéreur d’un bien immobilier estimera qu’on fait tout pour le dissuader de son investissement.
Le marché – cette fameuse main invisible – a trouvé un début de solution : les prix de l’immobilier commencent à refluer. Les pouvoirs publics, de leur côté, tentent de trouver les bons dosages. Plus pompeusement, on appelle cela l’art de gouverner.
Patrice Chabanet