Eco-Hebdo : des vessies et des lanternes
Viande végétale. En soi, l’expression a quelque chose d’incongru. Comment un produit carné peut-il être végétal ? Les linguistes ont la réponse. À l’origine le mot viande désignait « ce qui sert à la vie ». Aujourd’hui il désigne uniquement la chair comestible d’un animal. La mode qui consiste à nous faire avaler un steak végétal constitue donc une forme de retour aux sources. On peut compter sur le marketing pour nous en convaincre. Les plus sceptiques verront dans ce stratagème une façon habile de nous faire prendre des vessies pour des lanternes.
De fait les fabricants jouent sur les mots. La « viande végétale » peut être bonne sans lui donner pour autant toutes les qualités organoleptiques d’une viande carnée. L’amateur de viande saignante ou bleue n’y retrouvera pas la saveur désirée. Mais il ne sera pas dupe, comme l’a établi la Cour de Cassation après l’action intentée par Interbev, organisme représentant la filière bovine. « Le risque de confusion entre les deux catégories de produits et donc d’erreur par le consommateur n’est pas établi », ont estimé les juges.
Cette polémique, sur fond de procédures, révèle la sensibilisation, l’hypersensibilisation diront certains, des consommateurs qui veulent savoir, à l’ingrédient près, la composition de ce qu’ils mangent. C’est le cas avec les produits cuisinés. L’affichage est souvent contesté. Ainsi l’origine « Europe » est trop vague. Cela dit, là comme ailleurs, le mieux est l’ennemi du bien. Une fois tel ou tel ingrédient identifié on peut tirer d’autres fils, ceux de sa méthode de fabrication, des engrais utilisés, des pesticides, de la proximité d’une usine polluante, etc., etc. L’information légitime du consommateur ne doit pas se transformer en une lecture fastidieuse de données techniques.
Patrice Chabanet