Du fait de la Covid-19, le champagne ne coule plus à flot en Haute-Marne
Le secteur du champagne souffre du confinement, du couvre-feu, de la fermeture des restaurants et des bars et de la suppression des salons. A Rizaucourt, la baisse de la commercialisation peut aller jusqu’à 40 %. Explications.
De – 20 % à – 30 % de vente de champagne durant l’année 2020 par rapport à 2019. La crise sanitaire et ses conséquences ont fortement impacté la viticulture de l’ouest de la Haute-Marne. Les maisons de champagne sont diversement touchées selon leurs modes de commercialisation.
Hervé Hudelet et son fils Henri travaillent la vigne sur 4 ha 30 sur Rizaucourt et Argentolles. 30 % de la production vont à un négociant et 70 % partent lors de salons, dans des commerces, restaurants, supermarché et à l’export. 25 000 bouteilles sont élaborées chaque année pour répondre à ce réseau et aux ventes directes à la maison qui donne, d’ailleurs, l’occasion de rencontrer la célèbre Janine Hudelet et sa gouaille.
Mais, en 2020, les confinements, les couvre-feux, la fermeture des restaurants et des salons sont passés par là et la maison Hudelet annonce une baisse des ventes de 35 à 40 %. Henri Hudelet se veut aussitôt rassurant : « le champagne n’est pas une denrée périssable. Il peut rester en cave pour vieillir. Notre chance est qu’il ne se perd pas contrairement aux produits frais ».
Malgré tout, la baisse est importante d’où, pour compenser, la confection d’un site Internet « pour se mettre à la page » et davantage de démarchage et de livraisons auprès des bons clients. Henri Hudelet résume : « nous allons chercher les clients mais nous subissons quand même la situation. Jusqu’à maintenant, nous n’avions jamais eu à entrer dans cette démarche ».
Report des investissements
Naturellement, la conséquence est directe sur la trésorerie avec un constat expliqué par Henri Hudelet : « les viticulteurs qui n’ont pas d’investissements à payer résistent. Les autres paient doublement cette crise ». Quant à son père, il a choisi de reporter des investissements prévus. Alors que cela n’était pas le cas, il apparaît que les viticulteurs devraient plus facilement accéder aux aides de l’État. Le plafond de 50 % de pertes du chiffre d’affaires a disparu.
A noter que pour répondre à la baisse de la demande, les lois de l’économie disent qu’il faut baisser les prix. Pas dans le champagne qui est un produit prestige et de luxe et qu’il faut préserver comme tel. La baisse du prix des bouteilles fait perdre de la valeur au vignoble. Les viticulteurs et les maisons de champagne ont toujours préféré jouer sur les quotas de production plutôt que sur les prix. La démocratisation du champagne ferait que sa production ne serait plus rentable. Henri Hudelet parle d’un juste équilibre à atteindre.
Frédéric Thévenin
Des nouvelles de la vigne
Les vignes proches de Colombey sont actuellement au repos et les viticulteurs sont entre deux périodes de taille des sarments. La première s’est déroulée entre la mi-novembre et Noël et la deuxième se fera après les possibles fortes gelées et avant mars. Henri Hudelet explique qu’après la taille, la vigne a besoin de trois semaines pour la cicatrisation. Afin qu’elle se fasse dans de bonnes conditions, il est préférable d’éviter les fortes gelées comme le 11° lundi dernier, à Rizaucourt. La taille reprendra, normalement, après la Saint-Vincent.
Le coup de bol de la maison Daubanton
Toujours à Rizaucourt, la Sarl Champagne Daubanton-Mouillat ne cache pas qu’elle a connu, en 2020, « une année atypique ». Jean-Jacques Daubanton parle même « d’un gros coup de bol » en ayant conscience d’être « un cas à part ».
La maison travaille l’export depuis une dizaine et, en 2020, ce choix a payé. Il a permis de compenser les pertes auprès des restaurants qui étaient fermés ou qui fonctionnaient à 50 %. Les ventes vers l’Asie, l’Italie, le Canada mais aussi les achats dits de précaution qui poussent à acheter douze bouteilles au lieu de six “au cas où” ont sauvé l’année avec un chiffre d’affaires similaire aux autres années.
Par contre, Jean-Jacques Daubanton est moins confiant pour 2021 sachant que les trois premiers mois de 2020 avaient été bons avant de s’écrouler en mars (-73 %) et en avril (-95 %) et avant un rebond en mai. « Pour 2021, nous avons peu de visibilité en termes de mariages, d’ouverture des restaurants ou d’événement sportifs. L’année sera plus difficile ».