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Dialogue social : Jean-Claude Volot met les pieds dans le plat

volot_forgesEn prenant la présidence de l’Association de Gestion du Fonds Paritaire National (AGFPN), Jean-Claude Volot s’est emparé à bras-le-corps de la question centrale du dialogue social. Avec son franc-parler, il dit tout haut ce que tant pensent tout bas. Depuis l’Abbaye d’Auberive, l’emblématique industriel entre dans la mêlée sociale et met les pieds dans le plat. (JHM du 6 septembre 2016).

JHM : Dans quel dessein avez-vous été élu président l’AGFPN puisqu’il n’y a plus de dialogue social en France ?

Jean-Claude Volot : «Faux ! Archi faux ! Il y en a. La preuve : 80 % des accords d’entreprises sont signés par tous les syndicats. Vous êtes trompés par les postures des directions nationales de syndicats comme la CGT et FO, qui se croient obligées de dire non avec une absolue désinvolture alors que leur base signe les accords dans les entreprises. Certes, il y a des choses à améliorer ; on va s’y employer. Sur le terrain, ce dialogue est une réalité concrète.

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JHM : Pourquoi faudrait-il changer les choses ?

J.-C. V. : «Parce que nous vivons dans un monde qui change. Sur les quatre acteurs majeurs de l’univers capitalistique, les actionnaires, les fournisseurs, les clients et les salariés, les salariés revendiquent aujourd’hui d’avoir voix au chapitre. On a pu constater leur représentation effective au sein des conseils d’administration cet été avec l’affaire EDF.

JHM : C’est une grande entreprise…

J.-C. V. : «C’est encore plus vrai dans les petites, genre start-up. Les salariés qui participent à l’idée fondatrice sont actionnaires. L’entreprise est valorisée à partir de l’intelligence de ses salariés créateurs. On ne peut le nier. C’est une tendance historique : le salarié devient peu ou prou actionnaire.»

JHM : Cela change quoi ?

J.-C. V. : «Cela le place résolument au cœur du dialogue dans l’entreprise. Il est écouté en Conseil d’administration. Cette tendance va aller s’accentuant. Les chefs d’entreprise ne doivent pas s’y opposer.»

JHM : Le capitalisme est-il compatible avec le dialogue social ?

J.-C. V. : «Mondialement, on assiste à une forme particulière de concentration du capital. Elle touche plus l’univers du digital (Google, Amazon, Apple etc.) que l’industrie traditionnelle. Ce mouvement se traduit par ce qu’on appelle l’Uberisation qui est pour moi une forme de paupérisation. On se dirige donc vers au moins deux capitalismes : celui de Google et celui des entreprises de 20 salariés. Ce capitalisme-là, il faut le réinventer, afin de permettre à l’individu de se réaliser en son sein. Le dialogue social que j’appelle de mes vœux est à la base de la réinvention du système.»

JHM : Avez-vous un mode opératoire ?

J.-C. V. : «J’ai plusieurs pistes. D’abord mettre fin au privilège de premier tour aux élections de comité d’entreprise. Pour favoriser la syndicalisation des salariés, je suis favorable au chèque syndical : l’État paye la cotisation. En France, la syndicalisation obligatoire, qui se pratique ailleurs en Europe, serait inconstitutionnelle.»

JHM : Favoriser la syndicalisation ? Vous allez heurter le patronat !

J.-C. V. : «Faire entrer les salariés dans les projets de l’entreprise, ce n’est pas un risque, mais une opportunité. À condition aussi d’améliorer les positions des salariés réformateurs.»

JHM : Qu’apporteront les réformateurs ?

J.-C. V. : «Du dialogue, de la médiation en cas de conflit. Tout ce qui se pratique ailleurs et qu’on ne connaît pas en France. Il faut anticiper les difficultés au sein de l’entreprise. On ferait plus de préventif, moins de curatif. C’est cela, le fondement du dialogue social : les patrons écouteraient les demandes des syndicats ; cela permettrait de mettre en place des solutions de médiation AVANT le conflit.»

JHM : Pensez-vous que la France soit prête à cette révolution sociale ?

J.-C. V. : «Le climat est favorable. Les Français vivent mal la mondialisation. Nous devons faire fi des clivages politiques et faire bloc, ce qui permet justement le dialogue social.»

JHM : Et chez les syndicats ?

J.-C. V. : «Au sein de la CFDT, un Thierry Bettencourt, par exemple, a pris la juste mesure des enjeux. La situation est plus complexe à la CGT, tiraillée entre trois tendances : les traditionalistes, les gauchistes et les réformateurs. L’avenir de la CGT est riche d’incertitudes.»

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