Déstabilisation – L’édito de Patrice Chabanet
La rétention de copies de bac ne peut et ne doit être assimilée à une prise d’otages. A force d’user cette expression jusqu’à la corde on insulte ceux qui ont vécu de véritables prises d’otages, qui ont souffert dans leur chair ou qui, parfois, ont perdu la vie. Ceci étant posé, le fait de retenir les copies d’un examen emblématique – le baccalauréat – est particulièrement grave. Toute revendication syndicale mérite le respect, ce qui n’autorise pas pour autant toutes les formes d’action, surtout quand elle est minoritaire. Le discours subliminal qui s’adresse aux lycéens et à leurs parents est bien connu, même s’il est éculé : c’est le ministre qui, par son intransigeance, est à l’origine de la rétention des copies. Le sophisme est trop gros pour être crédible. Dans les faits, on le voit dans tous les reportages, les jeunes sont déstabilisés. On le serait à moins. La copie d’une épreuve n’est pas un bien qu’un correcteur peut s’arroger le droit de détenir pour des motifs autres que la correction et la notation.
Les syndicats qui ont déclenché cette grève des notes ont pris une lourde responsabilité, à commencer par l’hostilité de l’opinion publique. Le gouvernement joue sur du velours, et cela d’autant plus que, pour être spectaculaire, la rétention des copies est largement minoritaire. Il trouvera certainement des solutions, notamment la prise en compte du contrôle continu, pour combler l’absence de notes. Les lycéens ne devraient pas être pénalisés par un conflit qui ne les concerne directement et qui constitue l’énième épisode d’un désaccord quant à la réforme des lycées.
Une fois de plus, c’est la gestion du monde de l’Education qui est remise en cause. Il ne s’agit pas d’évoquer à nouveau le mammouth. Mais visiblement, le gigantisme de la structure pose problème dès lors qu’on veut la faire bouger. Ça craque ou ça bloque.