Des milliers d’instants – Edito de Christophe Bonnefoy
Hier Portsmouth. Aujourd’hui les plages de Normandie. Les célébrations du 75e anniversaire du Débarquement, fastueuses tout autant que poignantes, ne sont pas seulement l’hommage global au courage de 150 000 Alliés qui vinrent ouvrir la voie vers une liberté retrouvée. Elles n’offrent pas uniquement un souvenir diffus de ces soldats que rien ne prédestinait à se retrouver en mer, un matin de juin 1944, à des milliers de kilomètres de chez eux. Ou de ces Résistants qui combattirent l’ennemi jusqu’à la mort. Voire de ces anonymes qui accueillirent, protégèrent, couvrirent ceux que l’Allemagne d’Hitler voulait exterminer. Et en payèrent le prix le plus fort, qu’ils aient été exécutés ou déportés.
Ce D-Day version 2019, c’est aussi un hommage individuel à chacun des acteurs de ces heures décisives. Le souvenir dévoilé de moments très personnels, d’instants T vécus par chacun de ces milliers de soldats entre l’Angleterre et la France. Ou de Français face à la mort, à quelques minutes de leur dernier souffle. Un temps suspendu multiplié par 100 000, 150 000, 200 000… Encore plus émouvant, lorsqu’il s’agit, quasiment, de portraits individuels. Et qui donne, s’il en était encore besoin, la mesure du courage de tous ceux qui affrontèrent l’occupant.
Ainsi ces vétérans, montés hier sur scène et ovationnés debout. Ou ce jeune Résistant de 16 ans, qui écrivit à sa famille sa soif de liberté, son amour pour son pays, juste avant d’être fauché par les balles allemandes : « Je meurs pour ma patrie (…) C’est quand même dur de mourir. Mille baisers. Vive la France ». Des mots qui auraient pu s’effacer, au fil du temps. Mais qui ne tomberont jamais dans l’oubli. Qui ne doivent jamais tomber dans l’oubli.