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Dernière ligne

Le 28 février 2008, un adolescent décédait des suites de l’absorption d’un mélange de Valium et de Subutex. Déclarés coupables d’avoir fourni ce cocktail meurtrier au défunt, White Mike et Chris Kenton ont respectivement été condamnés à trois ans et trente mois de prison ferme.

 

Le 27 février 2008 au soir, la fête bat son plein dans un appartement langrois. Adultes aux réputations sulfureuses se mêlent à jeunes filles et adolescents. Les effluves de résine de cannabis se mêlent aux vapeurs de bière et whisky. Majeurs, White Mike et Chris Kenton gagnent la cuisine de l’appartement. Deux mineurs les accompagnent. Plusieurs comprimés sont pilés. Agé de 16 ans, Steeve sniffera une ligne. Une dernière ligne. Pris de vomissements, un adolescent manquera de passer de vie à trépas. Steeve n’aura pas cette chance. Rentré au domicile familial en fin de soirée, l’adolescent sera retrouvé sans vie au petit matin par mère et demi-soeur.

L’autopsie ne tardait pas à révéler une cruelle vérité : le mélange de buprénorphine (Subutex, substitut de synthèse aux opiacés) et diazépam (Valium, anxiolytique couru des héroïnomanes) a entraîné un violent et fatal œdème pulmonaire. L’enquête livrait des conclusions accablantes. La présence de Subutex et de Valium était relevée sur un dessous de plat saisi par les enquêteurs au cours de la perquisition menée dans l’appartement. Les gendarmes ne tardaient pas à identifier les personnes présentes au cours de la soirée. Deux participants intéressaient plus particulièrement les enquêteurs. Condamnés à maintes reprises, White Mike et Chris Kenton étaient placés en garde à vue. Suspectés d’avoir fourni le cocktail meurtrier au défunt, les deux hommes étaient mis en examen du chef d’homicide involontaire par violation manifestement délibérée d’une obligation de sécurité ou de prudence. Chacun niera toute implication directe, les versions des intéressés variant au fil des auditions.

Tristes personnages

Plus de quatre ans après le drame survenu au cœur des Quartiers neufs, White Mike et Chris Kenton n’auront pas eu le courage de croiser les regards de mère, sœur et autres parents d’un adolescent mort avant l’âge. Né d’une mère alcoolique, baladé d’un foyer à un autre, White Mike faisait rapidement état d’une profonde asociabilité. Agé de 24 ans, condamné à 29 reprises depuis 2005, incarcéré dès l’âge de 17 ans, confiant consommer du cannabis en cellule et étranger à tout processus de formation depuis son placement en détention, le Langrois se contentait de reconnaître avoir sniffé en compagnie du défunt. Mains dans les poches, vêtu d’un survêtement de pseudo caïd de cité, regard fuyant, voix et têtes basses, Chris Kenton dévoilait son pitoyable statut de petite frappe. Pressé par la présidente Bureau de s’expliquer quant à l’origine des cachets et la préparation des traces absorbées par voie nasale, le prévenu revenait sur de précédentes déclarations et niait toute implication directe. «Steeve allait bien quand il est parti», osait Chris Kenton, accablé par les déclarations de nombreux témoins décrivant un jeune homme au visage «livide» et aux yeux «révulsés». Les éléments à charge s’enchaînaient. Endetté de quelques dizaines d’euros, un toxicomane avait ainsi été délesté par les prévenus de comprimés de Valium quelques jours avant le drame. «Nous avons échangé les cachets contre du shit», affirmait Chris Kenton…

Après en avoir délibéré, magistrats et citoyens assesseurs ont été au-delà des réquisitions du procureur Prélot (lire ci-dessous). Purgeant actuellement différentes peines, White Mike et Chris Kenton ont respectivement été condamnés à trois ans et trente mois de prison ferme.

 

«Un simple coup de fil»

«Je me faisais du souci pour Steeve, il n’allait pas bien depuis quelques jours, il avait complètement changé. J’ai compris à la lecture de messages contenus dans son téléphone portable que mon fils était totalement désespéré» : animée d’une dignité tranchant avec l’attitude délétère des prévenus, la mère de Steeve a livré un témoignage poignant dénué de toute animosité. «Il aurait suffi d’un simple coup de fil aux pompiers, Steeve n’allait pas bien, mais personne n’a rien fait, ils ont préféré le laisser partir, a souligné la mère de famille. Kenton et Mike n’ont jamais présenté la moindre excuse, Kenton s’est même permis de toiser du regard une de mes filles avant son arrestation. Ils ont détruit nos vies, mais ils n’en ont même pas conscience !» La mère du défunt a également fait état de vaines démarches engagées plusieurs semaines avant les faits auprès des services de l’Association de défense et de prévention de la jeunesse (ADPJ). «On m’a répondu “votre fils va bien, c’est un adolescent, il fait des expériences, ne rompez pas le dialogue afin de pouvoir réguler sa consommation de cannabis”, mais personne n’a pris la mesure de la souffrance de Steeve», a commenté la mère de famille, sans tenir à accabler une structure accompagnant de nombreux jeunes en difficulté.

«Assumer ses actes»

«Un mineur décède chaque année par overdose en Haute-Marne», a poursuivi Me Charlot, atterré par «l’attitude lamentable» des prévenus. «Quand on est adulte, on se doit d’assumer ses actes, Kenton et Mike auraient pu avoir un rôle d’ami, un rôle de grand-frère auprès de Steeve, mais ils ont préféré le faire plonger, a clamé l’avocat, à l’adresse de magistrats et citoyens assesseurs. Kenton et Mike ont multiplié les mensonges, ils ont pris les gendarmes, le juge d’instruction, vous-mêmes et les victimes pour des imbéciles. Claudel pérore dans son box, Kenton et Mike avouent continuer à consommer du cannabis en prison, mais ils n’ont pas un mot pour les victimes !»

 

«Ils n’avaient pas le droit»

Après avoir salué la dignité de la mère de Steeve, le procureur Prélot a veillé à rappeler différents éléments à charge susceptibles de forger la culpabilité des prévenus. «Des traces de Subutex et de Valium ont été retrouvées là où Kenton et Mike reconnaissent avoir consommé plusieurs traces, ces traces ont entrainé le décès d’un garçon robuste, en pleine force de l’âge. L’absorption de ces traces est liée aux actions des prévenus. A 20 ans, ils n’avaient pas le droit de se comporter ainsi, ils n’avaient pas le droit de proposer de pareilles saloperies à des enfants de 16 ans», a martelé le représentant du Ministère public avant de requérir 30 et 24 mois de prison ferme à l’encontre de White Mike et Chris Kenton.

«Connaître la vérité»

Assurant la défense de Chris Kenton, Me Grosjean a tenté d’entretenir le doute. «Je suis déçu, j’avais espoir de connaître la vérité, assurait l’avocat avant de livrer une plaidoirie visant à aboutir à la relaxe de son client. Qui a emmené le Valium et le Subutex ? Nous n’en savons rien ! Steeve n’allait pas bien, ils consommaient des produits stupéfiants, lesquels, nous le savons pas, mais il en consommait ! Steeve semblait fatigué lorsqu’il est arrivé à l’appartement. Avait-il consommé différents produits dans l’après-midi ? Nous ne le savons pas non plus ! En fait, nous ne savons pas grand chose, nous savons simplement que cette soirée s’est mal terminée. Des traces ce Valium ont été retrouvées, mais il y avait régulièrement des fêtes dans cet appartement. De quand datent ces traces ? Une fois de plus, nous n’en savons rien ! Nous n’avons aucune preuve matérielle, dans ces conditions, en matière pénale, le doute doit profiter au prévenu !»

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