Délits routiers en comparution (presque) immédiate
Deux comparutions immédiates en cette fin de semaine au tribunal correctionnel de Chaumont. Des dossiers prioritaires. Des atteintes à la personne, un de ces courageux bipèdes à la gifle facile ? Négatif. Des atteintes aux biens, un des auteurs des multiples cambriolages enregistrés ces dernières semaines ? Négatif. Des délits routiers.
Nidhal K. s’avance sous bonne escorte dans le box sécurisé réservé aux prévenus. Trivialement parlant, monsieur l’aurait bien cherché. « Vous êtes imperméable aux décisions judiciaires », notait le procureur Cecoltan. Le 22 septembre 2022, à Langres, au volant du véhicule de son employeur, le prévenu était invité par les hommes en bleu à stopper sa route. Problème, le Langrois n’est provisoirement plus titulaire de son permis de conduire.
« Un véritable mépris »
« Une peine est homologuée le 8 septembre 2022, douze jours plus tard, monsieur est interpellé au volant alors que je venais personnellement de lui expliquer qu’il ne pouvait plus conduire, son comportement témoigne d’un véritable mépris pour la justice », tonnait le procureur Cecoltan avant de rappeler que le conducteur, sous l’empire d’un état alcoolique, une bien mauvaise habitude, circulait à une vitesse excessive.
Et puis, la personnalité du prévenu interroge. « Six mentions en l’espace de 18 mois ». Dont une condamnation pour extorsion. En prime, une supposée absence de prise de conscience. « Monsieur vous regarde dans les yeux et vous ment ! » Réquisitions ? « Incarcération immédiate ! » Huit mois de prison ferme. Et révocation au même quantum du sursis encadrant une précédente condamnation.
« Monsieur reconnaît les infractions », commença par noter Me Tribouley. « Il n’y a pas eu d’accident, mais au total, il devrait être condamné à 16 mois de prison ferme ? Monsieur travaille depuis près de deux ans dans la même entreprise, mais on veut l’envoyer en prison, il va devenir quoi ? A la maison d’arrêt de Chaumont, il n’y a plus de psychiatre, le Csapa (Centre de soin, d’accompagnement et de prévention en addictologie) est débordé, il est compliqué de suivre une formation.» Décision ? Quatre mois de prison ferme. Sursis révoqué à hauteur de quatre mois. Et surtout, direction la case prison.
Incarcéré
Deuxième dossier. Urgent ? Prioritaire ? La défense apportera une réponse pour le moins précise. Le 15 juin, à Semoutiers, Houari A. faisait l’objet d’un contrôle routier attestant de la consommation de cannabis. Traitement classique. Suspension du permis de conduire, ce précieux sésame.
Condamné par le passé pour trafic de stupéfiants ou extorsion, le quadragénaire est actuellement incarcéré, sur décision du juge d’application des peines, suite au non respect de différentes obligations fixées dans le cadre d’une précédente condamnation. Sortie programmée au 28 janvier.
Au nom du prévenu, Me Alfonso sollicitait un délai, de droit dans le cadre d’une comparution immédiate, afin de préparer la défense de son client. Soucieux des conséquences d’un éventuel appel de la décision ayant motivé, pour une cause totalement extérieure au dossier du jour, l’actuelle incarcération du prévenu, le procureur Cecoltan sollicitait un maintien en détention dans l’attente d’une audience de renvoi fixée au 14 novembre.
« Trop, c’est trop ! »
Me Alfonso pouvait partager sa stupéfaction. Sa colère, aussi. « La parole de la défense est libre, dans ce dossier, on détourne la procédure de comparution immédiate, trop, c’est trop ! Les faits datent du 15 juin, on contrôle monsieur, on le laisse repartir et là, trois mois plus tard, on va le chercher en maison d’arrêt, on le place en garde à vue, on le présente en comparution immédiate en me demandant de fournir des pièces alors que j’ai été saisie du dossier il y a quelques heures et on sollicite un maintien en détention alors que monsieur est actuellement incarcéré, cette demande est abusive et injustifiée, comme tout le reste. On instrumentalise le tribunal, les bras m’en tombent, ça suffit ! »
Houari A pouvait rejoindre la maison d’arrêt. Il y était déjà. Il en ressortira le 14 novembre, afin de répondre d’un délit routier reconnu dans le cadre de sa garde à vue.
T. Bo.