Dėgagisme – L’édito de Patrice Chabanet
Il en est du football comme de toutes les activités humaines. Il vit un changement d’époque. La Coupe du monde ne fait que le confirmer. L’heure est au dégagisme. Des hiérarchies bien établies s’effondrent. Les pronostics apparemment les plus plausibles sont souvent démentis. Avant même le début de la compétition, la non-sélection de l’Italie constituait déjà un premier signal. Après, il y a eu la kyrielle d’éliminations d’équipes emblématiques : l’Allemagne, l’Espagne, le Portugal, les Pays-Bas. Avant-hier, c’était au tour du Brésil, l’un des grands favoris, de tomber dans le piège belge. Résultat : au terme de ces quarts de finale, la Coupe du monde s’est transformée de facto en Coupe d’Europe : France, Belgique, Angleterre et Croatie.
L’effondrement de nombreuses grandes nations du football n’est certainement pas dû au hasard. Il faut y voir sans doute l’ascendant des grands clubs sur les équipes nationales. Pour un joueur, consciemment ou inconsciemment, vaut-il mieux se donner à fond pour défendre les couleurs nationales dans une compétition aléatoire que pour faire le job dans le club qui le paie, souvent à l’étranger ? Les intérêts financiers ne sont pas les mêmes, surtout pour les stars. L’animosité des Brésiliens à l’encontre de Neymar, leur joueur vedette, après la cuisante défaite devant la Belgique est une manière de lui signifier qu’il n’a pas mis tout son talent supposé au service de son pays. En clair, Neymar n’a pas la fibre nationale d’un certain Pelé.
Il n’en demeure pas moins vrai que les supporters restent très attachés à leurs équipes nationales. Les Etats aussi. Une coupe du Monde a un effet fédérateur, fût-il passager. Elle donne une image de dynamisme et de leadership bien au-delà de la sphère sportive. La Chine l’a bien compris. Elle investit massivement dans le football. Les résultats ne sont pas encore visibles sur le plan international. Pas encore…