De Chaumont à la sécurité de François Mitterrand pendant 12 ans
Formé à l’école de gendarmerie de Chaumont, Fabrice Halopeau a intégré très vite le fameux GSPR, dédié à la sécurité du « PR » – le président de la République. Douze ans durant, il a veillé à celle de François Mitterrand, dans sa sphère privée. Sans jamais rien dévoiler.
Deuxième Compagnie de l’école de gendarmerie de Chaumont, « la rouge, la plus dure ». Dans la famille de Fabrice Halopeau, le père travaille à la fonderie. A Revin (Ardennes), le quotidien est rude. L’exemple de deux oncles gendarmes ? Peut-être. En tout cas, Fabrice s’engage à 18 ans. Il est affecté à l’école de Chaumont. « Ma pré-orientation, c’était le Groupe d’intervention de la gendarmerie nationale (GIGN), mais j’étais trop jeune ».
Il rejoint la Garde républicaine, et veille notamment à la sécurité « officielle » du président de la Chambre Haute Alain Poher, de 20 h à 8 h, quand celui-ci dort au Sénat. Très vite, Fabrice glisse vers la « partie privée », au sein du Groupe de sécurité de la présidence de la République (GSPR) et c’est de la sécurité du président François Mitterrand dont il a la charge. « A l’Elysée, c’est la compagnie républicaine qui veille à sa sécurité, la CSPR ».
Discrétion absolue autour de François Mitterrand
« La discrétion est le maître-mot ». Evident n’est-ce pas… Reste que, dans la bouche de Fabrice Halopeau, la qualité requise est en mode absolu. « Mon épouse n’a jamais su que j’étais avec François Mitterrand ». Président auprès duquel son mari restera… douze ans. « Elle a appris l’existence de Mazarine par la presse… ». En privé donc, Fabrice conduit plusieurs fois François Mitterrand à Latche, à Gordes, aussi, et neuf fois en Egypte. « A l’époque, on veillait à l’intégrité physique et à la dignité du président 24 h sur 24 ». La mission est bien remplie si et seulement si « celui qu’on protège accepte d’être protégé ».
« J’aurais donné ma vie pour lui »

« Il se crée une proximité ». Fabrice apprécie que le président repère « les gars de chez (eux) », il retient qu’il écarte des ministres pour « laisser faire le GSPR ». Le « gros potentiel émotionnel » de François Mitterrand le frappe, notamment quand il se rend dans d’anciens camps de concentration en Pologne. « J’ai vécu des choses avec lui… ». Mais motus, toujours et encore. Fabrice se contente d’évoquer « la relation mystique » que le premier personnage de France entretient avec le monde. « J’aurais donné ma vie pour lui ».
L’habileté à convaincre de François Mitterrand le sidère. Qu’il soit confronté à un officier malien disant son peu d’attachement à la France ou bien à des manifestants vignerons remontés, le président les « retourne ». Il se souvient conjointement de son « humanité ». En revanche, Jacques Chirac est un président avec lequel il n’accroche pas, il est un an à ses côtés. Avant de mettre le cap sur un autre type de mission – du moment qu’elle est « spéciale », Fabrice contourne systématiquement les situations « faciles ». Il travaille sur l’orpaillage illégal en Guyane, et il est formateur.
« Le GSPR compte cent gendarmes ». Jusqu’à 1981, les cent militaires travaillent avec « dix camarades policiers ». Entre eux, « l’harmonie » règne, le sentiment est réciproque, et ce fonctionnement fluide va durer. « Je suis entré au GSPR à 23 ans ». Jamais Fabrice n’a regretté, bien au contraire. « Au total, ça a aussi été une opportunité sociale, le moyen d’engranger des connaissances et une ouverture sur le monde ».
Fabienne Ausserre
f.ausserre@jhm.fr