Dans la douleur – L’édito de Christophe Bonnefoy
Mais qu’est donc venu faire Gérard Depardieu mercredi soir aux côtés d’Emmanuel Macron (virtuellement bien sûr) ? En pleine crise, profonde on le subodore, sinon des institutions, en tout cas politique, on attendait le chef de l’Etat sur la loi immigration. Elle seule. Uniquement elle. Exclusivement.
Non seulement, le cas de l’acteur est arrivé sur la table, mais de surcroît, les propos du président de la République ont réussi à faire détourner le regard d’un sujet essentiel vers un autre, carrément polémique. Il était évident qu’en dénonçant une « chasse à l’homme », Emmanuel Macron s’assurerait une couverture qui ferait passer la loi immigration pour un sujet annexe. On exagère à peine.
Spontanéité de la part du premier des Français ? Affirmation sincère de convictions profondes ? Ce serait presque lui faire offense, que de penser à un simple cri du cœur presque si maladroit. Déclarer ou redéclarer sa flamme, là, à ce moment précis, ça s’appelle allumer un contre-feu. Un seul sujet brûlant cristallise les attaques. Ouvrir deux, trois, quatre, cinq fronts ou plus dilue à l’inverse la portée des saillies de l’adversaire. Des adversaires. Mais ne les éteint néanmoins pas.
Au-delà de cette surprise du chef et de cette “récréation” inattendue, la situation politique demeure en effet ce qu’elle était devenue aussitôt après le vote des députés sur la loi immigration : encore plus difficilement gérable qu’auparavant. On en est, pour poser pêle-mêle les faits, à un ministre qui démissionne, à une autre, ce jeudi, qui en avait l’intention mais s’est vue retoquer par le Président, à des Départements qui refusent, en toute illégalité, de se plier à ce que les parlementaires ont voté, ou encore à une CGT, par exemple, qui appelle à la « désobéissance civile ». Intenable ? Pour l’instant ça tient. Dans la douleur, mais ça tient.