Compétence Eau : un transfert qui ne coule pas de source
CONSEIL COMMUNAUTAIRE DES SAVOIR-FAIRE. La communauté de communes des Savoir-Faire (CCSF) s’est réunie une ultime fois, cette année 2023, pour une séance très technique, mais qui a mis en exergue une échéance forte (et qui ne lui est pas exclusive) : la difficile prise de la compétence Eau.
C’était la dernière séance… de l’année. Les délégués de la communauté de communes des Savoir-Faire (CCSF) se sont retrouvés, jeudi 14 décembre, pour la dernière fois de l’année 2023, à Corgirnon. Une trentaine de points figuraient à l’ordre du jour, en grande majorité très techniques et consensuels. Pas moins d’une dizaine de décisions budgétaires modificatives ont, par exemple, été passées à la chaîne et comme des lettres à la poste par Christophe Bourgeois, vice-président en charge du pôle Développement du territoire.
Finalement, l’un des rares points à avoir fait débat est celui relatif à l’engagement d’une consultation pour recruter un cabinet d’études en vue du futur transfert de la compétence Eau, des communes vers l’intercommunalité, à compter du 1er janvier 2026. Cette translation n’est pas exclusive à la CCSF mais concernera toutes les communautés de communes et intercommunalités, en vertu de la loi NOTRe. Comme dans l’immense majorité des zones rurales, les maires sont vent debout face cette échéance.
L’exercice communal de la compétence Eau permet, en effet, une grande souplesse et réactivité. Les maires des villages opèrent directement dans leurs châteaux d’eau et, en cas de difficulté, savent rapidement faire diligenter les travaux par un prestataire. La pratique intercommunale risque de complexifier et d’allonger les délais, sur une compétence ô combien sensible.
Une estimation salée
« Je sais que vous n’êtes pas d’accord pour le transfert. Je vais vous dire : moi non plus ! Mais c’est la loi… », a lancé en préambule Eric Darbot, président de la CCSF. « Peut-être que les choses évolueront », a-t-il ajouté, faisant référence aux nombreuses objections qui se font jour au sein des collectivités locales depuis plusieurs années. « Mais je suis allé, en octobre, à la conférence des intercommunalités de France à Orléans. Les grandes communautés de communes et d’agglo, elles, sont pour ce transfert. On ne peut pas prendre le risque d’attendre le 31 décembre 2025 et se demander alors ce qu’on va faire… Nous devons nous préparer », a conclu le président, en évoquant un nécessaire sens de la responsabilité.
Sa position de principe a été partagée par la grande majorité des délégués communautaires. Ce qui a revanche surpris et incommodé les délégués est l’estimatif : 170 000 € HT pour une simple étude. William Joffrain, maire de Valleroy, n’a pas caché sa stupeur : « C’est une très bonne idée de faire une étude. Je suis tout à fait d’accord : il faut se positionner pour dans deux ans. Mais le prix est astronomique ! Alors, pour ce prix astronomique, il faudra être exigeant et vigilant : le bureau d’études devra aller sur le terrain, dans toutes les communes ».
« C’est prévu ! », a abondé Eric Darbot, tandis que Christophe Bourgeois précisait que cette somme de 170 000 € HT n’est qu’un estimatif, qui l’a, certes, désagréablement étonné. Le vice-président espère ainsi obtenir une bonne surprise avec la mise en concurrence, à l’issue de l’appel d’offres. En attendant, tout le monde s’est accordé sur l’inanité d’un tel transfert de compétence sur un territoire tel que les Savoir-Faire. Petite cerise sur le gâteau : la préfète a fait savoir que le financement de l’étude ne sera pas éligible à la Dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR), le subventionnement étatique. « L’Etat nous oblige mais ne finance pas ?! », s’est étranglé un élu. Le principe de l’étude a été validé avec trois voix contre et trois absentions.
N. C.
AU FIL DES DOSSIERS…
Les attributions de compensation approuvées. — Les délégués ont approuvé les attributions de compensation 2023, c’est-à-dire le flux financier entre communes et intercommunalités pour compenser les services communs et autres transferts de fiscalité.
Avance de subvention pour le CIAS. — Le conseil communautaire a consenti une avance budgétaire de 250 000 € pour le Centre intercommunal d’action sociale CIAS Avenir, au titre de l’année 2024.
La mutuelle Just approuvée. — Déjà présente à Langres, la mutuelle Just, qui ne fonctionne qu’avec des collectivités locales mais au bénéfice de l’ensemble des habitants du territoire considéré va investir celui de la CCSF. Le but est de permettre en particulier aux populations les plus fragiles — petits retraités, étudiants, etc. — de bénéficier d’une couverture mutuelle appréciable à tarifs bien plus avantageux.
ILS ONT DIT…
Lettre aux hommes de chiffres. — Lors de son intervention commentant le prix estimatif prohibitif de la future étude sur le transfert de la compétence Eau (lire ci-dessus), William Joffrain a exigé que le cabinet qui sera sélectionné vienne sur le territoire : « Je ne veux pas d’un cabinet parisien qui reste dans son bureau en ne se basant que sur des chiffres ». Avant d’ajouter, après avoir avisé ses voisins de table, travaillant sur les finances de la communauté de communes : «… Avec tout le respect que j’ai pour les hommes de chiffres ! ». Il a évité de justesse la mise à l’amende.
Non d’un quota ! — Délégué de Haute-Amance, François Demont est toujours l’un des intervenants les plus prolixes en conseil communautaires, n’hésitant jamais à s’opposer s’il l’estime nécessaire. Jeudi soir, il l’a fait à deux reprises, votant non à deux délibérations. « D’habitude, ce n’est qu’une fois mais j’étais en retard pour mon quota de l’année ! », a-t-il plaisanté après coup.